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Depuis leur retour au pouvoir, en 2021, les talibans afghans disent refuser tout compromis sur leurs valeurs au nom d’une foi inébranlable dans l’islam. Le succès de la lutte contre la culture du pavot utilisé pour la fabrication de l’héroïne, dont le pays était le premier producteur mondial, serait le symbole de cette pureté doctrinale. La réalité diverge un peu.

Après la « stricte interdiction » de sa production, en avril 2022, la récolte du pavot, qui avait drastiquement chuté, en 2023, a augmenté, en 2024, de 19 %, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC). D’après l’Organisation des Nations unies (ONU), les chefs islamistes auraient laissé faire pour ne pas s’aliéner le soutien d’une partie de la population rurale mécontente d’avoir perdu une large part de ses revenus.

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Le décret de l’émir Haibatullah Akhundzada, chef suprême des talibans, bannissant la culture du pavot, avait fait chuter, en 2023, la récolte de 95 % dans le pays. Fin 2024, note l’ONUDC, « 12 800 hectares » de pavot ont été cultivés en Afghanistan, soit près de 20 % de plus qu’en 2023. Les provinces du Sud-Ouest, longtemps épicentre de cette culture, ont été supplantées, en 2024, par le Nord-Est, qui concentre désormais 59 % de la production totale, notamment la province du Badakhchan. Mais le fief historique des talibans, la province du Helmand, dans le Sud, enregistre une augmentation de 434 %.

Heurts entre fermiers et policiers

L’étendue des champs de pavot dans le pays est encore loin d’atteindre les 232 000 hectares recensés en 2022, mais cette tendance marque un arrêt brutal. Les talibans n’ont pas voulu se mettre à dos des régions qui ont manifesté contre la politique d’éradication menée par leurs policiers. En mai, dans le Badakhchan, les heurts entre des fermiers réfractaires et les membres des brigades antinarcotiques venus détruire des champs de pavot ont fait plusieurs morts. « Pour nous, dit un agent de l’ONU, joint à Kaboul, il s’agit moins de la volonté des talibans d’acheter la paix sociale que de leur peur de porter préjudice à leurs plus loyaux et anciens supporteurs, les agriculteurs pachtounes. »

L’importante perte de revenus, en l’absence de solutions de remplacement, a contraint les paysans à réduire leurs dépenses alimentaires et de santé, accentuant la malnutrition et l’exposition à des risques sanitaires accrus. Des choix court-termistes ont été faits au détriment des préoccupations environnementales à long terme. Le coton, préféré aux cultures vivrières, moins rémunératrices, a vidé les réserves d’eau souterraines. Or, la pénurie d’eau touche durement ce pays frappé par trois années de sécheresse d’affilée et par une baisse accélérée des nappes phréatiques.

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