Alors que le rapporteur public avait envoyé un signal encourageant aux militants s’opposant, en novembre, au chantier de l’A69, le tribunal administratif de Toulouse va dans le sens inverse. La juridiction a rejeté, mardi 21 janvier, une demande de suspension en urgence du chantier de l’autoroute devant relier la quatrième ville de France à Castres, dans l’attente d’une décision sur l’arrêt des travaux.
« Le juge des référés ne suspend pas les travaux de l’A69 car l’affaire devant être jugée “au fond” par le tribunal le mois prochain, le projet en cause ne produira que très peu d’effet concret d’ici là », écrit le tribunal administratif de Toulouse dans un communiqué.
Lundi 13 janvier, les opposants à l’A69 avaient demandé devant le tribunal administratif de Toulouse la suspension « urgente » du chantier, soulignant les effets sur l’environnement des « lourds travaux prévus » dans les prochaines semaines. Au cours de ce nouvel épisode de la longue bataille engagée entre opposants et partisans de l’A69, un représentant de l’Etat et un avocat du constructeur avaient estimé que les travaux « de compensation » prévus auraient au contraire des effets bénéfiques pour l’environnement.
« Tous les travaux impactant les espèces protégées ne sont pas réalisés, loin de là », avait souligné l’une des avocates des opposants, Julie Rover, citant notamment le cas de la loutre. Dans une ambiance lourde, Me Rover a également dénoncé, documents à l’appui, sous le regard sceptique d’avocats de la partie adverse ou du représentant de la préfecture du Tarn, un projet visant à « combler » certains cours d’eau.
« Un moment-clé »
Au nom de la préfecture du Tarn, Yasser Abdoulhoussen avait assuré que « les travaux les plus impactant sur les espèces protégées » ont déjà été réalisés, alors que des travaux « de compensation » restent à faire. De ce fait, « c’est une suspension éventuelle, même provisoire, qui serait dommageable pour l’environnement », avait-il déclaré.
Il avait également mis en avant les « préjudices » qu’entraînerait une suspension des travaux particulièrement complexe pour un chantier s’étendant sur des dizaines de kilomètres. Certains travaux prévus sont « utiles à l’environnement », a également souligné l’avocat d’Atosca, constructeur et futur concessionnaire de l’A69, Carl Enckell, citant les passages facilitant les déplacements des animaux.
Pour les opposants au projet, en revanche, « bon nombre de mesures compensatoires sont elles-mêmes attentatoires aux espèces protégées », a souligné Julie Rover. « C’est un moment-clé de la lutte contre le projet d’autoroute », avait estimé à l’Agence France-Presse une opposante au projet, membre du collectif La Voie est libre, avant l’audience. Ce collectif et d’autres associations partenaires avaient engagé cette nouvelle action après la réouverture de l’instruction concernant les autorisations environnementales du chantier, décidée le 9 décembre 2024 par le tribunal administratif de Toulouse.
Une tribune demandant une réforme du droit de l’environnement
Cette décision a été qualifiée d’« étonnante » par les associations qui, après des mois de lutte sans succès contre l’autoroute, avaient repris très sérieusement espoir. En effet, la rapporteuse publique, magistrate indépendante dont les avis sont souvent suivis, s’était prononcée pour une annulation de l’autorisation du chantier de l’A69, lors d’une audience sur le fond le 25 novembre.
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En dépit de ce qui a déjà été réalisé sur ce tracé de 53 kilomètres prévu pour relier à partir de fin 2025 Castres et Toulouse, les opposants estiment qu’il « n’est jamais trop tard pour renoncer », d’autant que le chantier a, selon eux, « plus d’un an de retard » − une affirmation vigoureusement contestée par Atosca.
En amont de l’examen du référé, plus d’une centaine d’avocats et d’universitaires ont signé en fin de semaine dernière une tribune demandant une réforme du droit de l’environnement. Selon ces professionnels, le dossier de l’A69 serait en effet emblématique d’une « politique du fait accompli » dans le cadre des grands projets d’infrastructures où « tout est fait pour préserver les intérêts économiques » au détriment du droit.