Un projet de jumelage de la ville Strasbourg avec le camp palestinien d’Aïda, en Cisjordanie, est soumis au vote du conseil municipal lundi 23 juin dans l’après-midi, créant des tensions entre les opposants à l’initiative et ses promoteurs.
En début de matinée, une cinquantaine de membres de la communauté juive de Strasbourg se sont réunis devant le centre administratif pour manifester contre ce projet, à l’appel du CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) d’Alsace, du Consistoire israélite du Bas-Rhin et du Fonds social juif unifié (FSJU). Ces organisations entendaient manifester leur soutien à Israël et réclament de la part des élus de « véritables initiatives de paix ».
Elles demandent aussi la reprise du jumelage de Strasbourg avec la ville israélienne de Ramat Gan. Ce jumelage, qui date de plus de trente ans, est « gelé », car les « conditions ne sont pas réunies », avait précisé en mai à l’Agence France-Presse la maire écologiste, Jeanne Barseghian. Elle avait annoncé parallèlement sa volonté de nouer un jumelage avec le camp d’Aïda, situé près de Bethléem, en « soutien au peuple palestinien ».
Manifestation et contre-manifestation
Benyamin « Nétanyahou, il passera, la guerre finira, bientôt j’espère. Mais l’existence d’Israël, c’est-à-dire le sionisme, on ne peut pas le remettre en question sous prétexte que le dirigeant actuel et que la guerre actuelle on les réprouve », a déclaré Dalia Adjedj, l’une des manifestantes. Sur les pancartes brandies, des slogans, tels que « la paix au Proche-Orient et à Strasbourg », ou « Soutien à la ville de Ramat Gan sous les bombes ».
A quelques mètres, une poignée de manifestants ont scandé des slogans de soutien à la Palestine, remettant en cause le gouvernement Nétanyahou et appelant les « juifs à [les] rejoindre contre le sionisme, pas contre le judaïsme ».
Le mois dernier, le CRIF avait exprimé sa « consternation », puis critiqué le keffieh porté par Jeanne Barseghian lors de la visite à Strasbourg d’une délégation du camp d’Aïda ainsi que le cadeau reçu : une « carte d’Israël couverte de drapeaux palestiniens sur tout le territoire sur lequel Israël a disparu ».
« Accepter un tel cadeau tout en portant le keffieh quand on représente la ville de Strasbourg est un choix politique grave et lourd de sens », avait déploré le CRIF.
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La Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme) a, de son côté, annulé une action éducative prévue au début de juin en partenariat avec la Mairie de Strasbourg, déplorant un « militantisme aux accents antisionistes ».
« Huile sur le feu »
Quant à l’opposition municipale, elle a reproché à Mme Barseghian d’avoir « contribué à importer ce conflit dans notre ville, jetant de l’huile sur le feu et provoquant l’incompréhension – voire l’indignation – de nombreux Strasbourgeois, de toutes origines et de toutes convictions, légitimement inquiets face à l’escalade dramatique au Proche-Orient ». Dans une missive commune, Pierre Jakubowicz (Centristes et progressistes), Catherine Trautmann (Faire ensemble Strasbourg) et Jean-Philippe Vetter (Union de la droite et du centre) ont réclamé le dégel du jumelage avec Ramat Gan, en Israël.
A l’inverse, plusieurs partis (PCF, NPA, La France insoumise) et syndicats de gauche (FSU, Solidaires, CGT) ont soutenu la maire EELV.
Le jumelage avec Aïda vise à renforcer les échanges et la coopération dans les domaines de la jeunesse, selon la municipalité. La délibération présentée en conseil municipal « réitère son appel à une paix juste et durable, à un cessez-le-feu immédiat et à la fin du siège de Gaza, ainsi qu’à la libération immédiate et sans condition des prisonniers et otages, dans le respect des résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité des Nations unies ».
Mme Barseghian a « condamné fermement » la recrudescence d’actes antisémites survenus à Strasbourg depuis l’attaque du Hamas en Israël, le 7 octobre 2023.