Le premier syndicat agricole de France, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), appelle vendredi 26 septembre à une « grande journée d’action » à travers tout le pays, aux côtés des Jeunes Agriculteurs (JA), pour protester contre des importations jugées « aberrantes ».
A Versailles, une quinzaine de tracteurs étaient par exemple stationnés depuis l’aube devant le château, selon différents médias. D’autres mobilisations sont attendues : défilés devant des supermarchés, des préfectures, présentation de produits vilipendés (pommes du Chili, noix des Etats-Unis, etc.)… Jeudi, des rassemblements symboliques se sont également tenus, loin cependant des grandes journées de blocage des deux hivers derniers alors que vendanges et récoltes occupent encore le monde paysan.
Dans le viseur des agriculteurs : le projet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et des pays latino-américains du Marché commun du Sud (Mercosur), dont Bruxelles a lancé début septembre le processus de ratification. La France, hier très opposée à l’accord, semble depuis se montrer moins défavorable. Plus globalement, il s’agit de se mobiliser contre « le Mercosur, les taxes imposées par Donald Trump et le flot des importations internationales qui ne respectent pas les normes qui sont les nôtres », a déclaré Arnaud Rousseau, le président de la FNSEA, qui avait prévu des mobilisations plus tard dans l’automne dans un premier temps.
Peser sur le gouvernement
« N’importons pas ce qu’on ne veut pas qu’on produise. C’est ça, l’hypocrisie de l’Europe. Sous couvert d’écologie, on importe ce qu’on ne produit pas ici, avec aucune norme environnementale et sociale », déplorait ainsi jeudi Dominique Noury, éleveur de vaches charolaises et de volailles, lors d’une action à Dijon.
L’accord avec le Mercosur doit permettre à l’UE d’exporter davantage de voitures, machines, vins… Mais l’accord facilitera aussi l’entrée de bœuf, volaille, sucre, miel, riz, exemptés de droits de douane. Bruxelles insiste sur la faiblesse des volumes attendus, mais les filières européennes concernées crient au risque de déstabilisation et de baisse des prix, et surtout à la concurrence déloyale du fait de normes de production moins-disantes sur le plan sanitaire et environnemental et de contrôles défaillants.
Ordre syndical dispersé
Jeudi, une cinquantaine d’agriculteurs, selon des représentants syndicaux, ont bloqué l’entrée d’un Buffalo Grill à Pusey, près de Vesoul (Haute-Saône), pour la défense de la viande française. Dans le centre de Dijon, 150 agriculteurs sont venus, avec 41 tracteurs et bennes, déverser fumier, terre et paille devant la Maison de l’Europe. « On importe de la viande qu’on n’a pas le droit de produire chez nous, alors qu’on a l’agriculture la plus durable au monde », a expliqué à l’Agence France-Presse Antoine Fauchet, président des JA d’Is-sur-Tille (Côte-d’Or).
La « base, elle suit. Même s’il n’y a pas de gouvernement, on veut que la copie soit déjà sur le bureau du ou de la prochaine ministre », explique Luc Mesbah, secrétaire général de la FDSEA de la Haute-Garonne. Le texte sur le Mercosur doit encore être approuvé par les Etats membres puis par le Parlement européen, la Commission espérant leur aval d’ici fin décembre.
Les syndicats agricoles expriment leur opposition au traité dans un rare mouvement d’unanimité, mais ils se mobilisent en ordre dispersé. La Coordination rurale, dans une volonté de se démarquer, veut être reçue par le premier ministre, Sébastien Lecornu, pour lui présenter ses propositions avant une mobilisation « avant la fin de l’année ». Le troisième syndicat représentatif, la Confédération paysanne, a pour sa part a annoncé une manifestation à Paris, « tracteurs en tête », le 14 octobre.