Meilleures Actions
Histoires Web vendredi, mai 2
Bulletin

Parfois, dans les musées, on se sent épié. Là, l’œil d’un rhinocéros blanc, ici, d’une mésange charbonnière ; ailleurs, la pupille d’une chouette hulotte… Tous, ils nous guettent, nous hantent. Le peintre Romain Bernini a dispersé tous ces regards à Fontevraud : tableaux minuscules, ils constituent autant de pierres semées sur le magnifique parcours qu’il a composé là-bas. Plus grand site monastique d’Europe, cette abbaye est jouxtée d’un musée depuis 2021. Les deux institutions sont coutumières des cartes blanches aux artistes : ceux-ci ajoutent une strate aux neuf cents ans d’histoire de ce monastère géré par des abbesses, devenu prison au XIXsiècle, et aujourd’hui classé au Patrimoine mondial de l’Unesco.

Mais, pour la première fois, musée et abbaye s’unissent pour inviter un même artiste : c’est le principe des Zeugma, programme que Romain Bernini inaugure avec éclat, imaginant des allers-retours vertigineux entre les deux sites. Il a passé ici plusieurs semaines, à s’imprégner du silence, à apprivoiser la richesse du musée. On le dit musée d’art moderne, mais c’est aller trop vite. Le legs du couple Cligman, qui en constitue le fonds, ouvre bien d’autres horizons : la Grèce, le Congo, l’Iran se marient avec bonheur dans les vitrines. L’artiste a joué de ces alliages avec délicatesse, stupéfait de cet éclectisme. « J’ai travaillé plus lentement que d’habitude, j’avais souvent des moments d’arrêt face à ce passé complexe, ces métissages qu’offre la collection : une histoire de l’art sans hiérarchie, transversale. C’est ce qui m’a permis de m’y inclure, d’aller dans les interstices. »

Il vous reste 64.97% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Share.
© 2025 Mahalsa France. Tous droits réservés.