En cimentant d’une main leste un parpaing sur un muret, vendredi 22 novembre, Luc Rémont n’a pas seulement lancé le chantier de construction de la centrale du Ricanto, à Ajaccio. Le président-directeur général d’EDF a aussi mis fin à des années d’errance énergétique dans une microrégion où la dernière centrale thermique à fioul lourd de France métropolitaine, celle du Vazzio, est en activité depuis 1982.
« Chi va piano va sano, chi va sano va lontano [qui va doucement va sainement et loin] et là, on est allés très tranquillement », a ironisé le député (Horizons) de la 1re circonscription de Corse-du-Sud, Laurent Marcangeli, conjecturant que ce « rattrapage historique [irait] bien loin ». Ce nouvel équipement, dont la mise en service progressive est programmée pour la fin de 2027, répond « aux enjeux de sécurisation du réseau et de la transition énergétique, a promis M. Rémont, devant un parterre de 350 invités. C’est un outil au service du peuple corse. »
« EDF est fier d’investir 800 millions d’euros et 200 millions d’euros sur cinq ans pour la transition énergétique en Corse », a complété le patron de l’électricien. Un gros milliard, auquel s’ajoutent annuellement les « 250 millions d’euros de solidarité nationale afin que l’usager corse paie le même prix que sur le continent grâce à un système de péréquation tarifaire », a souligné la ministre du partenariat avec les territoires, Catherine Vautrin, venue expressément témoigner de l’engagement de l’Etat.
Enfin, la future centrale mobilisera « 6,2 milliards d’euros de frais de fonctionnement sur vingt-cinq ans », selon Mme Vautrin, et elle pèse, au dire d’EDF, « 100 millions d’euros de retombées économiques pour le territoire ». En pratique, ce moyen de production, d’une puissance de 130 mégawatts (MW) et fournissant le cinquième de la consommation annuelle insulaire, ne « joue pas petit bras », se défend EDF. La future centrale abaissera cependant de 65 % les émissions de CO2 grâce à l’emploi de la biomasse liquide (soit 100 000 tonnes d’huile de colza par an) et réduira de 75 % les rejets d’oxyde d’azote et de particules fines.
« Tournant décisif »
« Nous sommes satisfaits, mais nous revenons de loin », souffle Michel Fazini, le secrétaire général de la CGT Energie Corse. En février-mars 2005, l’île, paralysée par une neige tenace, avait vécu vingt-sept jours de coupures draconiennes, obligeant l’Etat à revoir sa copie de fond en comble, notamment en rénovant la centrale thermique de Lucciana (Haute-Corse) et en déplaçant celle du Vazzio, donc, sur la commune résidentielle de Bastelicaccia, aux portes d’Ajaccio.
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