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FRANCE CULTURE – DIMANCHE 22 DÉCEMBRE À 17 HEURES – DOCUMENTAIRE (PODCASTABLE)

Il faut entendre Forough Farrokhzad lire ses poèmes. Entendre son désir de femme. Son désir de liberté. « J’ai péché un péché lourd de plaisir/dans une étreinte ardente incandescente (…). Dans la douceur du lit mon corps ivre a frémi contre sa poitrine. » Entendre aussi les ténèbres contre lesquelles elle aura lutté tout au long de sa si courte vie : « Je parle du fond de la nuit », écrira-t-elle dans un très beau poème gravé sur sa pierre tombale dans le cimetière Zahir o-Dowleh à Téhéran.

Lire le portrait (en 1999) : Article réservé à nos abonnés Forough Farrokhzad, poétesse du « Vent »

Comme le raconte Michel Pomarède qui lui consacre un très beau documentaire, quand Forough (qui signifie « lumière ») Farrokhzad naît en 1934, « son pays va s’ouvrir à une modernité importée de l’Occident : l’école obligatoire devient mixte en 1936 et les femmes entrent à l’université de Téhéran la même année. Le port du voile est interdit ».

A 16 ans, elle tombe amoureuse d’un cousin, Parviz Shapour, qui deviendra un caricaturiste célèbre, et se marie deux ans plus tard. La Captive, Le Mur, La Rébellion − autant de titres de recueils de poésie qui parlent d’eux-mêmes. Pourtant, et si elle choque, Forough Farrokhzad est aussi celle qui fait entrer dans l’univers poétique des mots du quotidien : balai, cuisine, paillettes.

Contre les carcans de la rime

Comme le font remarquer, tour à tour, les intervenantes de ce documentaire (parmi lesquelles la traductrice Laura Tirandaz et les autrices Sorour Kasmaï, Maryam Madjidi, Niloufar Sadighi), Forough Farrokhzad renouvelle et démocratise la langue poétique, se bat contre les carcans de la métrique et de la rime.

En 1955, elle divorce mais la famille de son mari lui refuse le droit de revoir leur fils. Début d’épisodes dépressifs qui mèneront à de nombreuses tentatives de suicide. En 1958, elle rencontre l’écrivain et cinéaste Ebrahim Golestan, et, quatre ans plus tard, elle réalise La maison est noire, un documentaire sur la léproserie de Tabriz. Sorte de poème visuel, le court-métrage est remarqué par Chris Marker. Elle serre la main de Pasolini, côtoie Godard. Bertolucci envisagera même de faire un film sur elle.

Le 13 février 1967, Forough Farrokhzad meurt des suites d’un accident de voiture. Toute sa vie, elle aura écrit : « Pourquoi m’arrêterais-je ? Seule la voix demeure. » Autant dire que sa voix demeure et résonne comme jamais depuis l’arrestation, le 13 septembre 2022, de Mahsa Amini par la police des mœurs à Téhéran pour n’avoir pas porté assez strictement son voile, et sa mort, trois jours plus tard, après avoir été rouée de coups. Sans doute Forough Farrokhzad serait-elle descendue dans la rue pour protester elle aussi et clamer ces mots devenus le slogan des femmes iraniennes : « Femme, vie, liberté ».

« Forough Farrokhzad (1934-1967), incarner la lumière », documentaire de Michel Pomarède réalisé par Franck Lilin (Fr., 2024, 58 min). Diffusé le 22 décembre dans le cadre de l’émission « Toute une vie ». Disponible à la demande sur France Culture et sur toutes les plateformes d’écoute habituelles.

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