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La censure du gouvernement dirigé par Michel Barnier, mercredi 4 décembre, semble marquer l’échec d’une tentative de parlementarisation forcée de la Ve République. Laquelle est mise à l’épreuve par l’absence de majorité absolue à l’Assemblée nationale. Selon Rémi Lefebvre, professeur de sciences politiques à l’université de Lille, auteur de Faut-il désespérer de la gauche ? (Textuel, 2022), la culture politique du fait majoritaire, profondément enracinée dans le pays, ne saurait se transformer en si peu de temps. Bien qu’il attribue aux partis politiques une part de responsabilité, le politologue souligne qu’ils ne font que rester fidèles aux attentes de leurs électeurs.

Depuis les élections législatives de 2022, et à plus forte raison celles de 2024, on constate l’absence de culture du compromis dans la vie politique française. Pourquoi la France demeure-t-elle une exception parmi ses voisins européens ?

La culture du compromis, une culture parlementaire de base, a déjà existé dans la vie politique française, sous les IIIe et IVe Républiques. C’est différent sous la Ve République, où une culture majoritaire s’est rapidement imposée. A partir des années 1960 et jusqu’en 2022, le parti qui gagne les élections législatives dispose, presque toujours, d’une majorité absolue, donc la question du compromis parlementaire ne se pose pas.

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L’inversion du calendrier électoral depuis 2002 a renforcé cette « majoritarisation » de la vie politique. Emmanuel Macron lui-même, alors même qu’il ne s’attendait pas à avoir de majorité parlementaire, a fait élire plus de 300 députés venus de nulle part en 2017. Cette culture majoritaire est donc massive, très profonde, elle est liée, certes, à la présidentialisation, mais aussi aux partis et à la discipline partisane.

Or, on ne change pas une culture politique comme ça. Ce n’est pas quelque chose qui se décrète, c’est un apprentissage. Pour les partis, mais pas seulement. Cela vient aussi des électorats : je ne suis pas du tout convaincu que les citoyens soient favorables aux compromis. Bien sûr, quand on fait des micros-trottoirs, tout le monde veut du compromis, mais les électeurs sont aussi très attachés à des préférences politiques. La polarisation d’en haut, c’est aussi une polarisation d’en bas. Il y a une très forte injonction au compromis qui pèse sur les partis, mais il y a aussi une injonction à la loyauté et à la sincérité des partis à l’égard de leurs mandants. Dans la crise démocratique, les partis et les élus sont très attachés au lien de confiance – fragile – avec leurs électeurs.

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