« Outre-mer, puissances mondiales », sur La1ere.fr : les enjeux politiques des territoires français ultramarins

LA1ERE.FRANCETVINFO.FR – À LA DEMANDE – PODCAST

Et si on mettait l’outre-mer au centre de la carte ? Tel est le fil rouge de cette série de podcasts réalisée pour La1ere.fr, le portail numérique d’outre-mer de France Télévisions. Objectif : laisser de côté les lunettes hexagonales. Des Caraïbes au Pacifique, de l’océan Indien à l’Antarctique, des îles Eparses (« sanctuaires fragiles, îlots stratégiques ») aux terres Australes (« sentinelles du bout du monde »), les neuf épisodes font le tour de ces territoires pour la plupart minuscules mais souvent situés dans des points stratégiques de la planète. Soit 11 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive − deuxième domaine maritime mondial derrière celui des Etats-Unis −, qui « contribuent fortement à la présence diplomatique et géopolitique de la France ».

Une omniprésence à double tranchant. Le passif historique de la période coloniale fait aussi de ces « confettis d’empire » autant de talons d’Achille. Et le théâtre d’ingérences parfois inattendues. Ainsi de l’Azerbaïdjan qui, ulcéré du soutien de la France à l’Arménie dans la guerre du Haut-Karabakh, a décidé de contre-attaquer en… Nouvelle-Calédonie.

Espions azerbaïdjanais

En juillet 2023, « des élus et des militants indépendantistes sont venus participer au Groupe d’initiative de Bakou dans lequel le colonialisme français était clairement visé », rappelle le politologue Pierre-Christophe Pantz, chercheur à l’université de la Nouvelle-Calédonie. A Nouméa, lors des manifestations d’avril 2024, deux espions azerbaïdjanais, envoyés par le régime d’Ilham Aliev, s’étaient fait passer pour des journalistes. Interpellés, ils ont été renvoyés par le ministère de l’intérieur, qui a aussi coupé Tik-Tok dans l’archipel.

L’Azerbaïdjan, pays non aligné, est un précieux porte-voix pour les militants du Front de libération national kanak et socialiste (FLNKS). « Il faut se mettre à leur place. Pour eux, l’ingérence principale, c’est celle de la métropole », assure le géopolitologue Sémir Al Wardi, de l’université de la Polynésie française, qui ne croit pas au financement du FLNKS par Bakou.

Les podcasts nous emmènent ensuite dans l’océan Indien. La Russie y pratique, à l’égard de la France, une forme d’« ingérence déclarative », déclare Christiane Rafidinarivo, enseignante-chercheuse à l’université de La Réunion. En réponse aux condamnations par Paris de l’annexion de la Crimée et de la guerre en Ukraine, « la Russie a comparé Mayotte à la Crimée ».

Investir l’outre-mer pour rallier le Sud face à l’Occident, la Chine de Xi Jinping le fait aussi, en mode soft power avec ses « nouvelles routes de la soie », relate Sémir Al Wardi : « Elle finance des hôtels, elle crée des Instituts Confucius… »

Ces escarmouches montrent combien « la France est vulnérable dans ses outre-mer, qu’elle n’a pas su gérer », analyse l’universitaire polynésien. Les territoires ultramarins sont « un terreau fertile pour appuyer là où ça fait mal, freiner la reprise du dialogue nécessaire, radicaliser les discours », redoute M. Pantz, à Nouméa. Autant de défis pour une France qui, si elle revendique fièrement son deuxième domaine maritime sur la planète, n’occupe que le sixième ou septième rang des puissances navales.