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Le documentariste Jean-Michel Bertrand observe les loups, sur le terrain, depuis une dizaine d’années, notamment dans la vallée du Champsaur, dans les Hautes-Alpes. Vivre avec les loups, son troisième film sur le sujet, est sorti en janvier.

Comment réagissez-vous à l’abaissement du niveau de protection du loup par les Etats membres de la convention de Berne ?

Nous sommes un peu dans un jeu de dupes. En France, on est très loin de protéger strictement le loup puisque grâce aux dérogations, 19 % à 20 % des loups sont abattus [chaque année]. On peut tuer des louveteaux, on peut tuer des loups en toute saison, les femelles gestantes. Je peux comprendre que des gens veuillent se défendre par des tirs lorsque la pression est trop forte, je ne ferme pas la porte à cela, il faut être pragmatique. Mais les dérogations sont déjà excessives, il y a pas mal de dérapages et tout est toléré. Donc quand on voit qu’on va passer au stade supérieur, on se dit que ça va être « open bar ».

Avec cette décision, nous sommes dans de l’idéologie et dans une forme de populisme qui consiste à apporter une réponse simple à un problème très complexe.

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Dans votre dernier film, vous allez voir celles et ceux qui essaient de vivre avec le loup. Que vous ont-ils appris ?

Ce sont des gens qui ne représentent qu’eux-mêmes et qui racontent toute la complexité de la coexistence, les contradictions. Les éleveurs Olivier et Joseph, par exemple, font du bio dans les Baronnies [Drôme provençale] mais ils font venir des paquets de croquettes en hélicoptère pour leurs chiens, pour se protéger du loup. Rien n’est blanc et noir, on est dans le questionnement. En revanche, ce sont des gens qui ont subi des attaques mais qui ont la certitude qu’il faut faire avec, qu’il n’y a pas le choix. Ce film permet aussi de dire que c’est possible, même si ce n’est pas simple.

Cette cohabitation a donc déjà lieu ?

Dans le Champsaur, où je vis, on est chez des gens très hostiles au loup. Il y a quelques années, ils refusaient de mettre des chiens de protection, aujourd’hui ils en ont tous. Quand j’étais gamin, il y avait quatre bergers par ici, aujourd’hui il y en a des dizaines. Donc les gens se protègent mais il y a malgré tout cette volonté de supprimer des loups, d’être plus tranquilles, ces lobbies – les syndicats agricoles et les fédérations de chasse – qui s’opposent à la coexistence. Et les politiques se greffent là-dessus.

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