Un rapport publié lundi 18 novembre appelle à hausser le ton face au « fléau trop longtemps ignoré » des violences sexistes et sexuelles « sous relation d’autorité ou de pouvoir » dans l’ensemble des secteurs, du sport à la culture en passant par la politique. « Sept ans après #metoo, force est de constater la persistance des faits de violences sexistes et sexuelles (VSS) sous relation d’autorité ou de pouvoir », souligne ce rapport publié à l’issue d’une mission lancée au printemps dernier.
Cette mission a été confiée à six personnalités – la haute fonctionnaire Christine Abrossimov, la secrétaire générale de l’Association nationale des DRH, Christine Caldeira, l’ex-joueuse de tennis Angélique Cauchy, l’ex-sénatrice Bariza Khiari, la gynécologue Marie-France Olieric et l’avocate Rachel-Flore Pardo.
« On parle ici d’un sujet qui peut potentiellement toutes et tous nous concerner », a relevé Mme Pardo lors de la présentation du rapport devant la presse à Paris. « Autorité et pouvoir, ça peut paraître de grands mots, mais, en réalité, que ce soit la star mondialement connue ou simplement le maire d’un village ou encore le chef d’un service hospitalier, peu importe le contexte, les mécanismes de domination à l’œuvre sont les mêmes. »
« Tolérance zéro »
« Trop souvent, les hommes qui ont un ascendant par leur hiérarchie ou par leur pouvoir sont dans une position de domination », relève le rapport de 170 pages qui insiste sur le fait qu’aucun secteur n’est épargné et qui pointe des « inégalités persistantes » entre les femmes et les hommes créant un « terrain propice aux violences sexistes et sexuelles ».
« Il est bien évident que plus on sera dans un monde paritaire, moins il y aura de violences sexistes et sexuelles, surtout dans l’accessibilité des postes à responsabilité », insiste la gynécologue Marie-France Olieric. Et « plus on sensibilise, plus on éduque aux violences sexistes et sexuelles, moins on aura d’agresseurs et de victimes potentielles. »
« Si on veut que les gens aient confiance en la justice, mais aussi dans leur entreprise », poursuit-elle, il est essentiel d’afficher une « tolérance zéro, qui doit passer par un affichage de sanctions ».
Quarante et une recommandations
Au total, le rapport émet 41 recommandations, dont 15 « prioritaires dans le monde du travail » et 10 dans les domaines particuliers de la santé, de la culture, du sport et des institutions politiques. Il appelle par ailleurs à « lancer un Grenelle des violences sexistes et sexuelles ».
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Parmi les mesures phares, celles conditionnant le versement d’aides publiques (Etat-collectivités publiques) à la mise en œuvre effective de mesures de prévention des VSS (formation, communication…). La mission préconise également de confier « à un organisme indépendant la certification et le contrôle » des organismes de formation sur les violences sexistes et sexuelles et « de ceux réalisant les enquêtes internes ».
Elle suggère aussi de « créer un label “Agir contre les violences sexistes et sexuelles” pour distinguer les structures qui mettent en œuvre des outils de formation et de prévention adaptés ». Pour mieux repérer ces violences, la mission veut aussi « généraliser les structures d’écoute et de signalement ».
La prévention des VSS, « sujet obligatoire de négociation »
Dans le domaine spécifique du sport, le rapport préconise de conditionner la carte professionnelle sportive « au suivi effectif » de sensibilisation aux VSS. « Il faut également qu’il y ait de plus en plus des équipes à deux têtes d’entraîneurs, pour éviter des relations duales entre entraîneurs-entraînés », souligne Angélique Cauchy. « C’est souvent exclusivement des hommes, et l’entraîneur devient alors le seul référent, la parole absolue », ajoute l’ancienne joueuse de tennis, violée par son ancien entraîneur quand elle était mineure.
Dans le cadre de l’entreprise, enfin, le rapport préconise de faire de la prévention de ces violences « un sujet obligatoire de négociation » à tous les niveaux « sous peine de sanction pour les employeurs ».
Quelque « 9 % des viols ou tentatives de viols ont lieu au travail, 30 % des salariées ont déjà été harcelées ou agressées sexuellement sur leur lieu de travail et 70 % de ces victimes déclarent n’en avoir jamais parlé à leur employeur », selon un communiqué de l’intersyndicale (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) publié lundi.