Louis Degnan Samka a réalisé son souhait : produire un court-métrage musical, appelé Fantasia, en hommage aux victimes des attentats du 13 novembre 2015 à Paris, dans lequel il joue et a composé la musique. Nous l’avions rencontré il y a neuf ans chez sa mère, où il vivait à l’époque, quelques jours après les attentats. Lors de l’assaut des terroristes qui ont causé la mort de 130 personnes, il travaillait au café du Bataclan. Il avait reçu une balle dans la cuisse gauche, qui heureusement n’avait pas touché l’artère fémorale. Opéré le lendemain à l’hôpital Saint-Antoine, à Paris, il remarchait cinq jours plus tard. « J’ai eu beaucoup de chance, j’ai une bonne étoile », nous confie-t-il aujourd’hui.
S’il hésite à parler de trouble de stress post-traumatique (TSPT), il a souffert d’« une dépression passive, des angoisses » peu de temps après les attentats. « Je commençais à moins sortir de chez moi, à moins voir de gens, avec parfois des visions de scènes où on se tire dessus, mais sans vraiment me rendre compte que ça n’allait pas, raconte Louis Degnan Samka. C’est une forme de combat où on est tellement déconnecté du réel, hors du temps. On se demande surtout pourquoi ça nous est arrivé à nous. » Sa mère lui a donné le contact d’un psychologue. Il commence une thérapie en 2020. Le terme de TSPT est posé.
« J’avais du mal à me considérer victime, j’étais dans une sorte de déni, plutôt en mode survivant. » Son psychologue et son avocat l’incitent à demander réparation. Ce n’est pas si simple. « Tous les ans, on est invités à assister aux commémorations, mais dans le même temps, j’ai dû avoir plusieurs expertises pour obtenir une indemnisation, car mes blessures n’étaient pas physiques mais psychiques… », observe l’artiste.
« Je suis l’un d’eux et je ne les oublie pas »
Le procès des attentats du 13-Novembre, qui s’est tenu de septembre 2021 à juin 2022, l’a aidé. S’il a d’abord hésité à témoigner, « le fait d’extérioriser, de m’adresser aux terroristes… m’a aidé, et m’a permis de vraiment acter le fait d’avoir été victime ». Le fait de témoigner peut aider certains survivants à mieux appréhender ce qu’ils ont vécu.
Composer, créer… sans conteste, la musique l’a secouru. Il dit qu’il avait déjà ce rapport exutoire avec le rap avant les attentats, « un moyen d’expression, un moyen d’exister aussi ». En 2015, il signe en label indépendant, puis commence la production musicale et lance son propre label. « Malgré tout, j’étais un peu en mode survie, un peu dans la douleur », concède le trentenaire. Le fait de terminer en finale du Festival Emergenza en 2017, qui se déroule au Bataclan, constitue pour lui un virage.
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