Rencontre
Etre sous les feux des projecteurs est une habitude pour Thomas Adès depuis ses débuts. En 1993, le jeune compositeur attire l’attention par une œuvre pour ensemble de chambre, Living Toys, écrite au terme de sa formation à l’université de Cambridge avant de faire sensation, en 1995, avec un opéra licencieux, Powder Her Face, appelé à connaître de nombreuses productions. Ce Britannique aujourd’hui âgé de 53 ans s’est donc très tôt distingué des autres. Et parfois aussi de lui-même tant son langage a paru évoluer d’une partition à l’autre. Les Parisiens ont pu s’en rendre compte en 2023 avec le ballet The Dante Project puis, début 2024, avec l’opéra The Exterminating Angel, deux partitions données en création française sous la direction du compositeur.
En résidence – la troisième depuis 2018 – à la Fondation Louis Vuitton, à Paris, jusqu’au 16 novembre, Thomas Adès offre une nouvelle occasion de découvrir les développements récents de son catalogue. A l’instar de Shanty – Over the Sea qui sera exécutée lors du dernier concert, la plupart des œuvres retenues pour la circonstance relèvent de l’ère que le musicien qualifie de « postpandémique ». Si l’interprète (pianiste et chef d’orchestre) a été mis au repos forcé par le confinement dû au Covid-19, le compositeur n’a pas chômé. « Comme beaucoup de mes amis, j’en ai profité pour réparer dans la cuisine cette chose qui ne marchait plus depuis un moment », nous confie-t-il, de manière imagée. Ce qui signifie que Thomas Adès a révisé certaines partitions, parfois dans les grandes largeurs puisque l’orchestration de The Dante Project a fait l’objet d’une refonte totale dans la perspective de la création reportée à 2021.
Ecrire de nouvelles œuvres sans être soumis à une date butoir a également compté parmi les bienfaits du confinement. Thomas Adès s’est ainsi attelé à la mise en musique de poèmes en langue hongroise : sept mélodies pour voix et sextuor avec piano, réunies dans le cycle Növények (« Plante »). La première dans l’ordre chronologique, Gyökér (« Racine »), mais la seconde du recueil a connu une création en ligne sur Apple Music pour un effectif un peu différent (voix et deux instruments), disséminé entre trois lieux de résidence. Budapest pour la mezzo-soprano Katalin Karolyi, Mexico pour le percussionniste Ricardo Gallardo et Londres pour le pianiste Thomas Adès. « C’est une œuvre très importante pour moi, assure le compositeur, parce qu’elle m’a permis de rechercher une expression plus directe. »
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