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Histoires Web vendredi, novembre 8
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A l’âge de 2 ans, Jean-François (les personnes citées par leur prénom ont requis l’anonymat) a été placé pendant une dizaine d’années dans un orphelinat géré par des bonnes sœurs franciscaines. Il se souvient des nuits où quelqu’un le sort du lit et l’amène dans une guérite. Ce Normand de 76 ans a mis des années à comprendre qu’il avait été victime de violences sexuelles de la part d’une religieuse, fait rarissime dans l’Eglise. Jean-François a suivi des démarches pendant un an et demi auprès de la Commission de reconnaissance et de réparation (CRR) en 2021 pour obtenir une réparation financière. Mais le plus important n’était pas là pour le retraité. « J’ai senti que les sœurs m’ont écouté. Quelque part, elles étaient ma famille, je n’avais que ça comme souvenirs d’enfance. Qu’on s’occupe de moi, ça m’a fait du bien », retient-il.

Pour montrer leur bonne volonté, les religieuses lui ont proposé d’exposer sa collection de jouets en tôle. L’homme compte 3000 pièces chez lui. « On m’a dit que c’était parce que je n’avais pas eu d’enfance. Dans le fond, c’est sûr, j’aurais tant rêvé avoir des jouets quand j’étais gamin », analyse le retraité, la gorge nouée. « Symboliquement, ça voulait dire beaucoup, ajoute la supérieure générale de la congrégation. On a senti que ce monsieur avait besoin de réparer son passé. »

Comment réparer le passé de ces milliers de victimes de violences sexuelles ? Trois ans après le rapport de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise (Ciase), le défi de la justice restaurative est toujours majeur pour l’Eglise catholique française. Des démarches qui connaissent leurs réussites, mais aussi leurs échecs.

Première étape, l’écoute

Depuis 2021, deux instances de réparation ont déjà vu le jour : la CRR, pour les victimes de tous âges de membres de congrégations religieuses, et l’Instance nationale indépendante de reconnaissance et de réparation (Inirr), pour les victimes mineures de membres d’un diocèse. L’objectif affiché de ces deux structures est de s’intéresser avant tout à la victime, contrairement à une justice pénale qui se focaliserait sur le coupable. « Le but de la restauration n’est pas de faire disparaître le traumatisme mais de remettre en route une capacité de parler et d’explorer avec la victime ce qui a du sens pour elle, ce qui sera restaurateur », explique Lorraine Angeneau, psychologue clinicienne spécialisée en psycho trauma, ancienne membre de l’Inirr.

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