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Histoires Web samedi, octobre 26
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Au comble de l’accablement, Ben Gottlieb s’adonne à ce qu’il ne faudrait jamais faire, dans sa condition : il « s’autogooglise ». Le résultat de ses recherches n’est guère de nature à le requinquer, puisqu’il n’apparaît qu’après des centaines d’occurrences consacrées à d’autres Ben Gottlieb. Il faut dire que ses états de service n’ont pas de quoi affrioler Google : ce chantre d’une synagogue des environs de New York a perdu la voix – et la foi – depuis qu’il a perdu sa femme, morte des suites d’une stupide glissade. Suffisant en revanche, aux yeux de Nathan Silver, pour faire de ce Ben Gottlieb-là le personnage principal de son remarquable dixième long-métrage, Carla et moi, en salle depuis le 23 octobre.

L’homme qui lui prête ses traits, Jason Schwartzman, dispose lui aussi d’une flopée de parfaits homonymes. Parmi eux, un écrivain new-yorkais s’épanche régulièrement sur la difficulté de partager son nom avec un acteur aussi célèbre et célébré, depuis que Wes Anderson l’a révélé dans Rushmore (1998). Lorsqu’on le lui apprend, l’Américain tombe des nues. « D’autres Jason Schwartzman ? Vous plaisantez ?, fait-il mine de nous demander, de passage à Paris, fin octobre. L’autre Jason Schwartzman, c’est moi ! »

La boutade est moins anodine qu’elle n’en a l’air : issu d’une des dynasties les plus prolifiques du cinéma – il est le fils de l’actrice Talia Shire, le neveu du cinéaste Francis Ford Coppola, le cousin des réalisateurs Sofia et Roman Coppola… –, jonglant depuis un quart de siècle avec les casquettes de musicien, de scénariste, de producteur et d’acteur, on serait aisément, si on était à sa place, turlupiné par les troubles de l’identité.

« Jason ne tenait pas en place »

A 44 ans, en bon rejeton hollywoodien, il combat ces vertiges par l’action : c’est-à-dire en explorant les registres les plus variés du métier de comédien, en multipliant les alias, en redoublant d’activité et de curiosité. Damien Bonnard s’est lié d’amitié avec lui sur le plateau d’Asteroid City (2023), de Wes Anderson, où l’Américain jouait déjà un veuf déconfit et inconsolable. « Jason ne tenait pas en place, rembobine l’acteur français. Avec le matos qu’il avait rapporté dans sa chambre, il faisait de la musique, dessinait, sculptait des balles de tennis en papier mâché… Au petit déjeuner, il semblait découvrir chaque objet avec un émerveillement enfantin : “Tiens, un grille-pain ! Ah, une banane !” »

C’est à Damien Bonnard que Jason Schwartzman doit sa présence dans Carla et moi. Nathan Silver, le réalisateur américain, avait écrit le scénario en pensant à ce compatriote dont il admire, énumère-t-il, « la cadence, l’art de sortir la bonne blague au bon moment, le côté fureteur, fouineur ». Mais l’e-mail qu’il avait envoyé à l’agent de Schwartzman était resté sans réponse. Aussi Silver s’en est-il ouvert à Damien Bonnard, qu’il avait dirigé dans C’est qui cette fille ? (2017) et dont il est suffisamment proche pour lui avoir demandé de célébrer son mariage. « Je me suis permis d’appeler Jason et de lui dire : “Ecoute, je n’ai pas l’habitude de faire ça, mais tu devrais lire ce scénario” », confirme l’acteur français, avec modestie.

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