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Histoires Web mardi, octobre 22
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FRANCE 2 – MARDI 22 OCTOBRE À 23 H 50 – DOCUMENTAIRE

« Sergio Guataquira Sarmiento » : chaque année, le patronyme du réalisateur déborde de sa case dans sa déclaration d’impôt belge. Comme pour lui rappeler qu’il descend d’une communauté indienne quasi disparue de la forêt colombienne, les Cacuas, et qu’il ne les connaît pas. La découverte d’une vague de suicides inexpliqués chez ces autochtones va lui fournir le prétexte qu’il attendait inconsciemment pour se rendre sur place, longuement, afin d’enquêter sur ces pendaisons et surtout renouer avec ses racines.

Certains se souviennent peut-être de Simon pleure (2018), son court-métrage de fin d’études, à l’Institut des arts de diffusion de Bruxelles. On y voit un jeune homme, après un chagrin d’amour, pleurer littéralement « toutes les larmes de son corps ».

On retrouve cette nostalgie et cette sincérité désarmante dans Adieu sauvage – lors d’un spectacle, les images des enfants qui rient percutent la perception sensible du réalisateur. Tourné en numérique, le film est entièrement en noir et blanc, afin que le spectateur ne soit pas distrait pas les paysages et se concentre sur l’humain. Aussi faut-il se donner le temps de s’acclimater à cette atmosphère et au rythme lent pour apprécier la magie des rencontres, notamment avec Laureano Gallego Lopez, l’hôte du cinéaste dans sa maison, avec son épouse, Angelina, et leurs enfants à Wacara.

Langage très factuel

Avant de se rendre sur place, Sergio Guataquira Sarmiento avait lu que les Cacuas ne ressentaient pas d’émotions : c’est du moins ce que les « Blancs » avaient déduit après avoir constaté qu’ils ne disposaient pas de « mots » pour exprimer l’amour ou tout autre sentiment – ainsi, on ne dit pas « je suis triste » mais « je pleure ». Le réalisateur semble s’être calé sur ce langage très factuel pour commenter avec une lucidité désarmante les scènes de la vie quotidienne ou… ses échecs à accomplir les tâches quotidiennes des autochtones. Jusqu’à ce qu’il en saisisse le danger : « Ici, on s’étouffe à ne rien exprimer. »

Sergio va dès lors apprendre à Laureano de nouveaux mots pour extérioriser ce qu’il ressent, comme « nostalgie : c’est la joie d’être triste ». Progressivement, Laureano va se confier, à sa façon. Par exemple, il ne dit pas que son épouse et lui ont été mariés de force, mais qu’un jour, à 25 ans, ses parents lui ont fait « la surprise » de lui présenter sa future femme et qu’il n’a pas pu refuser.

En point d’orgue, un long monologue, dont le film respecte les silences, de Laureano surplombant une vallée que l’on devine majestueuse. Le réalisateur aura ici toutes les réponses qu’il cherchait, y compris à la question la plus précieuse pour lui : « Tu penses qu’un jour je serai indien ? »

Adieu sauvage, de Sergio Guataquira Sarmiento (Fr., 2023, 92 min), diffusé dans la collection « 25 nuances de docs ». Et sur France.tv.

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