« L’Amérique face à ses fractures », plongée au cœur d’un pays en souffrance

Livre. « Les Etats-Unis vont mal », tels sont les premiers mots du nouveau livre d’Amy Greene, spécialiste de la politique américaine et enseignante à Sciences Po, intitulé L’Amérique face à ses fractures (Tallandier, 256 p., 19,50 €).

Pour s’en convaincre, il suffit de mettre le doigt sur quelques réalités. Les petits commerces de proximité sont remplacés par les grandes enseignes et les zones industrielles excentrées, signe d’une précarisation économique. Les retraités retournent au travail, de jour comme de nuit, faute de pouvoir payer les frais liés au grand âge. Les familles de la classe moyenne finissent étranglées par leurs dettes médicales. Et les jeunes diplômés savent qu’ils ne parviendront pas à mener de front deux combats, le remboursement de leurs études et la fondation d’une famille ou l’acquisition d’une maison.

Ce n’est pas tout. Le vaccin contre le Covid-19 a fait l’objet de théories complotistes en tout genre. Les migrants s’entassent dans des camps de fortune. L’espérance de vie des Américains baisse. Le racisme est toujours un fléau. La montée des extrêmes, de la violence et de la polarisation a de quoi inquiéter.

Tensions extrêmes et durables

Bref, les voyants sont au rouge. Et ce alors même que les Etats-Unis continuent de rayonner. Le pays est toujours la première puissance mondiale et reste attractif – en témoignent les taux élevés d’immigration, le nombre d’étudiants internationaux, l’excellence des universités et de la recherche scientifique, ou encore la réussite indéniable des entreprises et des start-up. A quoi il faut ajouter de bons indicateurs économiques, comme la croissance ou une puissance militaire sans pareille.

« Pourquoi l’Américain ordinaire se sent-il loin de ces marqueurs de réussite ? Comment expliquer son pessimisme et les tensions extrêmes et durables qui caractérisent la vie civique et citoyenne américaine ? Comment cela nourrit-il le populisme, détricote-t-il le projet national commun et tourne-t-il voisins et oppositions en ennemis ? », s’interroge l’enseignante.

Pour le comprendre, elle ausculte les souffrances des Américains, du bilan terrible du surarmement à l’environnement alimentaire toxique, en passant par la tragédie des opioïdes, les dysfonctionnements du système sanitaire et le poids des inégalités économiques. Elle plonge également au cœur des tensions identitaires qui gangrènent le pays.

L’Amérique a toujours connu des luttes pour l’émancipation, mais, fait nouveau, analyse-t-elle, tous les groupes se sentent aujourd’hui menacés par les autres, dans un monde où les changements démographiques se produisent à grande vitesse – en 2045, la population des minorités devrait pour la première fois dépasser celle des Blancs.

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