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Histoires Web lundi, octobre 7
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Contrairement à ce qui avait été annoncé, il fait beau ce matin dans la baie de Dinard (Ille-et-Vilaine). Au loin, les remparts de Saint-Malo découpent le bleu délavé d’un ciel presque sans nuages. L’océan brille et une légère houle fait gîter le navire. Pour un peu, on se croirait parti en croisière. Du moins si le travail ne devait pas commencer aussitôt à bord du chalutier Louis-Fage.

A peine franchie la ligne des viviers, la technicienne Jézabel Lamoureux, de la station du Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Dinard, ouvre les mâchoires d’une benne à sédiments, puis lance l’engin à l’eau. Une fois la caisse remontée, la goulée d’échantillons des fonds marins est vidée dans un bac placé sur le pont : araignées de mer, crabes, poissons juvéniles, mollusques, herbes marines… une variété d’animaux et de plantes, caractéristiques des herbiers de zostères qui poussent près du barrage de la Rance, tout proche, émerge, pleine de vie, de la pelote de vase gluante, mêlée à des débris de coquilles et d’algues.

Nettoyage sommaire de prélèvements d’échantillons sous-marins, autour du port de Saint-Malo (Ille-et-Vilaine),  le 27 juin. 

La collecte concerne un seul individu par espèce, dont l’ADN sera prélevé, fragmenté et séquencé par morceaux, virtuellement assemblé et annoté sur ses régions codées par des gènes. Il viendra alimenter une banque de données réunissant les « génomes de référence » de 4 500 organismes marins eucaryotes (c’est-à-dire dont les cellules possèdent un noyau) des eaux françaises. Ce programme baptisé « Atlasea » est piloté par le CNRS et le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA).

Les campagnes DIVE-Sea consacrées au prélèvement des échantillons sur le littoral, au large ou en profondeur, sont, quant à elles, placées sous la responsabilité du Muséum. La première d’entre elles a mobilisé, du 24 juin au 7 juillet, quatre-vingts personnes dans une bande côtière allant du port de Cancale (Ille-et-Vilaine) au cap Fréhel (Côtes-d’Armor). Parmi les forces vives déployées : le personnel de la station de Dinard, l’équipage du Louis-Fage, mais aussi des plongeurs, des pêcheurs à pied, des taxinomistes et toute une flopée de biologistes marins, de bio-informaticiens, de généticiens, etc.

Ensemble lacunaire

« Le grand atlas des génomes du vivant reste encore à dessiner », explique Hugues Roest Crollius, directeur de recherche au CNRS et copilote d’Atlasea, le temps que le « pacha » Loïc Le Goff positionne le navire pour un nouveau « coup de benne ». Certes, après des décennies d’un effort colossal qui aura mobilisé les laboratoires du monde entier et coûté 3 milliards de dollars (environ 2,7 milliards d’euros), les biologistes sont parvenus à décrypter la quasi-totalité de l’enchaînement des 3,1 milliards de bases ou nucléotides (les lettres A, T, C, G) que porte l’ADN humain. Et cela de la partie centrale de leurs vingt-trois paires de chromosomes (ou centromères) jusqu’à leurs terminaisons les plus extrêmes (ou télomères).

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