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C’était une décision très attendue, et pour cause : elle pourrait permettre aux joueurs de football professionnels de rompre unilatéralement et à n’importe quel moment les contrats qui les lient à un club. Vendredi 4 octobre, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a estimé que les règles de la Fédération internationale de football (FIFA) encadrant les transferts entre clubs étaient « contraires » au droit de l’Union européenne et de « nature à entraver la libre circulation » des footballeurs professionnels.

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La CJUE tranchait là un contentieux qui oppose l’ancien international français Lassana Diarra à la FIFA et à la Fédération belge de football. Cet arrêt pourrait, à terme, avoir d’importantes conséquences sur les règles du marché des transferts.

Quel était le problème ?

L’affaire « Lassana Diarra et FifPro (la Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels) contre FIFA et Fédération belge de football » remonte à 2014. Cette année-là, le Lokomotiv Moscou, contrarié par les performances de l’ex-international français (34 sélections), souhaitait baisser son salaire alors que son contrat courait sur trois ans. Estimant cette baisse injustifiée, Lassana Diarra avait signifié son désaccord et émis le souhait de quitter le club russe pour rejoindre le Sporting de Charleroi (Belgique), qui s’était alors manifesté pour le recruter. Le club moscovite avait alors décidé de rompre le contrat du milieu défensif, jugeant qu’il avait cessé de l’honorer sans « juste cause ».

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S’appuyant sur les règles de la FIFA, le Lokomotiv Moscou avait, en outre, réclamé 20 millions d’euros – ramenés ensuite à 10,5 millions – à Lassana Diarra pour le préjudice subi. Car, selon le règlement de l’instance internationale, si un joueur rompt son contrat de manière unilatérale et « sans juste cause », celui-ci doit verser une indemnité correspondant à sa rémunération et ses avantages jusqu’au terme de son contrat. Autre règle édictée par la FIFA : un club engageant un joueur ayant rompu son contrat ainsi peut être condamné à payer solidairement ces frais et recevoir des sanctions sportives (pouvant aller jusqu’à une interdiction de recrutement). Cette menace avait fini par décourager le Sporting de Charleroi d’embaucher Lassana Diarra.

Soutenu par des syndicats de joueurs – notamment l’Union nationale des footballeurs professionnels et la Fédération internationale des associations de footballeurs professionnels –, le joueur français a saisi la justice belge. C’est dans ce cadre que la cour d’appel de Mons s’est adressé à la Cour de justice de l’Union européenne avec, en substance, l’interrogation suivante : les règles de la FIFA en matière de transfert des joueurs sont-elles compatibles avec le droit de la concurrence et la libre circulation des travailleurs au sein de l’UE ?

Qu’a décidé la Cour de Justice de l’Union Européenne ?

Vendredi 4 octobre, l’instance européenne rendue un arrêt penchant plutôt en faveur du joueur. En déclarant « contraires » au droit de l’Union européenne certaines règles de la FIFA encadrant les transferts des joueurs et de « nature à entraver la libre circulation » de ceux-ci, la juridiction établie à Luxembourg suit les conclusions de son premier avocat général, Maciej Szpunar. Ce dernier avait estimé, le 30 avril, que les règles de la FIFA transgressaient le principe de la libre concurrence en Europe.

La Cour de justice estime que les modalités imposées par la FIFA « font peser sur ces joueurs et sur les clubs souhaitant les engager des risques juridiques importants, des risques financiers imprévisibles et potentiellement très élevés ainsi que des risques sportifs majeurs, qui, pris ensemble, sont de nature à entraver le transfert international des joueurs ».

Les règles du marché des transferts vont-elles changer ?

A ce stade, il est impossible d’être formel. Dans l’affaire Lassana Diarra, la CJUE renvoie la balle à la justice belge dans son arrêt, jugeant que, « sous réserve de vérification » par la cour d’appel de Mons, les règles de la FIFA restreignant la concurrence « ne semblent pas indispensables ou nécessaires ». C’est désormais sur cette base-là que le contentieux entre le joueur français et la fédération internationale devra être tranché.

L’avocat belge Jean-Louis Dupont, qui défend Lassana Diarra – aujourd’hui retraité –, s’est félicité de cette décision « majeure pour la régulation du travail dans le football et plus généralement dans le sport ». La FifPro a également très bien accueilli la décision de l’instance européenne, considérant, dans une courte déclaration sur X, qu’elle « changera le paysage du football professionnel ».

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Dans les faits, on ignore à ce stade si les règles de la FIFA remises en cause par la CJUE vont être tout simplement gommées – et donner ainsi la possibilité à n’importe quel joueur de quitter un club à n’importe quel moment – ou être remplacées par d’autres. Dans son arrêt, la Cour de justice semble ouvrir la porte à cette seconde option. Elle précise que des raisons impérieuses, liées à « l’intérêt général », peuvent amener la FIFA à édicter de nouvelles règles en matière de transferts afin d’assurer une certaine stabilité en cours de saison dans les effectifs des clubs.

Vendredi, la FIFA s’est dite « satisfaite que la légalité des principes clés du système de transfert ait été reconfirmée » par la CJUE. L’instance considère, en effet, que l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne « ne remet en question que deux paragraphes de deux articles du règlement du statut et du transfert des joueurs ». La FIFA promet enfin d’« analyser la décision [de la CJUE] en coordination avec les autres parties prenantes ».

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