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Histoires Web lundi, novembre 11
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Les photos que l’on trouve sur internet les montrent comme deux ravissantes fillettes que rien ne distingue, en apparence, des enfants de leur époque – les années 1910, en Angleterre –, avec leurs nœuds en satin dans les cheveux et leurs robes à dentelles. Sauf que… De photo en photo, Daisy et Violet Hilton figurent toujours ensemble, collées l’une à l’autre, dans la même position. Et pour cause : liées l’une à l’autre, elles l’étaient, irrémédiablement, puisque nées siamoises, rattachées par le bas de leur colonne vertébrale.

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Leur histoire, extraordinaire, ne pouvait qu’attirer le duo d’acteurs-auteurs-metteurs en scène formé par Christian Hecq et Valérie Lesort, avec leur goût pour le monstre et l’étrange, les êtres en marge, rejetés par la société. La destinée des sœurs Hilton est donc au cœur de leur nouveau spectacle, créé au Théâtre des Célestins à Lyon avant de partir en tournée un peu partout en France. Et comme cette destinée est également emblématique de la société du spectacle qui se développe au début du XXe siècle, avec l’essor du cirque, du cabaret, de la comédie musicale et du cinéma, elle est aussi l’occasion pour l’inénarrable duo d’un jeu avec les formes comme ils les aiment, transgressant allègrement les frontières du bon et du mauvais goût : un théâtre monstre.

Exhibées dès l’âge de trois ans

Monstres de foire, Daisy et Violet l’ont été d’emblée, puisqu’elles ont été exhibées dès l’âge de trois ans, à des fins mercantiles, par leur mère adoptive, Mary Hilton. Et dès lors elles n’ont plus quitté l’univers parallèle du spectacle, Moloch qui les attirées puis sacrifiées, dans cette Amérique qu’elles rejoignent dès le milieu des années 1910. Elles savaient chanter et danser, elles étaient jolies, et elles ont eu un succès fou d’abord dans les cirques itinérants, puis sur les scènes de Broadway, avant que Tod Browning ne les fasse tourner dans son célèbre film Freaks (La Monstrueuse Parade), en 1932.

L’histoire est évidemment du pain bénit pour Valérie Lesort et Christian Hecq, qui l’installent, de tableau en tableau, dans un univers de cirque et de cabaret où les personnages semblent taillés directement dans les rideaux de velours rouge qui enveloppent la scène. Le ton est donné d’emblée par les deux Monsieur Loyal qui ouvrent la représentation, frères jumeaux qui installent le thème du double qui courra tout au long du spectacle.

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Et comme toujours avec eux, les idées ne manquent pas et les surprises sont là à foison. Théâtre d’ombres, objets animés, comédie musicale, strip-tease, magie, codes du cinéma muet et des films d’horreur… Christian Hecq et Valérie Lesort réinvestissent tout un folklore du cirque et du spectacle forain, d’autant plus qu’ils ont été rejoints par un autre grand inclassable de la création scénique contemporaine, le magicien et clown Yann Frisch. Tout se mélange, en des jeux d’illusion aussi séduisants que troublants, une illusion qui semble l’état d’existence même de personnages que le réel a rejetés hors de sa sphère : homme-tronc, Hercule de foire, vrai-faux (?) numéro de lanceur de couteaux aussi hilarant qu’inquiétant, apparition du célèbre magicien Houdini, qui apprend aux sœurs Hilton à « se dissocier mentalement ». Christian Hecq réhabilite même une discipline oubliée et qui faisait fureur, mais oui, en ces temps pas si anciens : la pétomanie.

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