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Histoires Web dimanche, octobre 6
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« Il n’est jamais trop tard pour trouver sa vie. » A 72 ans, Catherine Draveil* rayonne. Depuis une petite dizaine d’années, cette ancienne religieuse multiplie les expériences comme une adolescente découvrant la liberté : saut en parachute, rafting, percussions dans un groupe de musique, voyages… et l’amour bien sûr, tant spirituel que charnel.

Difficile d’imaginer un tel revirement en découvrant des photos de sa vie passée au couvent. On la voit notamment en 1980, lors de sa profession solennelle, vêtue d’une austère robe et d’un voile noirs, laissant tout juste apparaître son visage au-dessus d’une guimpe blanche. « Toute trace de féminité disparue, ne demeure qu’un visage peu souriant, commente-t-elle dans son autobiographie, Métamorphose (éd. Favres, 2023). Normalement, c’est pourtant un jour de grande joie. » « Je n’ai aucun regret, nuance-t-elle toutefois aujourd’hui. Il fallait que je fasse ce chemin pour en arriver là où j’en suis. Maintenant, je sais que chaque instant peut être un moment de bonheur. »

Une jeune fille fragile et rebelle

Catherine Draveil naît en 1952 à Chambéry (Savoie), dans une famille catholique traditionaliste aisée, qui comptera dix enfants. Sa mère estime devoir en donner un sur trois à Dieu, pour qu’il devienne curé ou moine, par exemple. Alors que la société se modernise – le concile Vatican II prône une plus grande ouverture des catholiques, la culture se libéralise dans le sillage de Mai 68… –, les Draveil se réfugient en Suisse et tendent à vivre en vase clos.

Rebelle, sensible aux évolutions du monde, la jeune Catherine s’inscrit en études de médecine. Ses parents sont horrifiés à l’idée qu’elle puisse pratiquer des avortements et insistent pour qu’elle abandonne. Après quatre années d’études, elle est rattrapée par sa culpabilité et décide de devenir religieuse.

C’est une jeune femme fragile à l’époque : à l’âge de 6 ans, elle a été victime d’attouchements sexuels par un garçon de 16 ans et aura souffert d’une dépression infantile précoce. Cette agression l’ « insécurise au plus haut point » et l’a poussée presque toute sa vie à chercher un cadre protecteur et coercitif, analyse-t-elle aujourd’hui.

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Le 6 janvier 1975, elle rejoint l’abbaye bénédictine « de Bocart », dans la région Provence-Alpes-Côte d’Azur. C’est en tout cas le nom qu’elle lui donne dans son livre. En réalité ce n’est pas le vrai nom du monastère, de même que « Draveil » n’est pas celui de Catherine. Dans son autobiographie, elle a maquillé tout ce qui permettrait l’identification des personnes concernées pour éviter de leur causer du tort.

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