Nicolas Sarkozy va-t-il recouvrer la liberté après vingt jours en prison ? La cour d’appel de Paris examine, lundi 10 novembre au matin, la demande de mise en liberté de l’ancien président français incarcéré après sa condamnation dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle. Le parquet général a requis sa mise en liberté sous contrôle judiciaire. « Les risques de concertation frauduleuse, de pression sur les témoins fondent des réquisitions sous fins de placement sous contrôle judiciaire », a déclaré l’avocat général Damien Brunet. La décision de la cour d’appel de Paris est attendue lundi à 13 h 30.
Agé de 70 ans, Nicolas Sarkozy a été placé en détention provisoire à la prison de la Santé, à Paris, après avoir été condamné à cinq ans de prison ferme avec mandat de dépôt assorti d’une exécution provisoire pour association de malfaiteurs dans l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle, une détention inédite pour un ancien président dans l’histoire de la République française et qui a suscité de vifs débats. Il a fait appel.
Durant l’audience d’examen de la demande de mise en liberté, Nicolas Sarkozy a déclaré que sa détention « est dure. C’est très dur, ça l’est certainement pour tout détenu, je dirais même que c’est éreintant », ajoutant vouloir rendre hommage au personnel pénitentiaire qui avait « rendu ce cauchemar (…) supportable ».
Son incarcération est aussi une première dans l’Union européenne, où aucun ancien chef d’Etat n’a connu l’emprisonnement. Le 25 septembre, le tribunal correctionnel de Paris l’a reconnu coupable d’avoir sciemment laissé ses collaborateurs démarcher la Libye de Mouammar Kadhafi pour solliciter un financement occulte de sa campagne présidentielle victorieuse de 2007.
Plus que la condamnation, c’est le mandat de dépôt l’envoyant en prison, non susceptible de recours, qui avait suscité la stupeur. Pour les juges, il est justifié par la « gravité exceptionnelle » des faits. Pour Nicolas Sarkozy, il a été motivé par « la haine ». Ses avocats avaient alors déposé une demande de mise en liberté dans les minutes qui avaient suivi son entrée en détention.
Les critères de la mise en liberté en question
Pour la demande de mise en liberté, les magistrats de la cour d’appel ne s’appuyant pas sur les mêmes critères que ceux du mandat de dépôt. L’appel de Nicolas Sarkozy a replacé son incarcération dans les critères de la détention provisoire, qui diffèrent de ceux de l’exécution de peine. Selon l’article 144 du code de procédure pénale, le maintien en détention d’une personne n’est alors possible que s’il est l’« unique moyen » de protéger des preuves, d’empêcher pressions ou concertations, de prévenir une fuite ou une récidive, ou de la protéger.
En attendant, en prison, l’ex-président est placé à l’isolement, mais deux officiers de sécurité sont installés dans une cellule voisine. Des dispositions justifiées par « son statut » et les « menaces qui pèsent sur lui », selon le ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez.
A la fin d’octobre, Nicolas Sarkozy a reçu la visite du ministre de la justice, Gérald Darmanin, une entrevue qui a suscité des critiques, notamment de magistrats. Dans une rare prise de position, le plus haut procureur de France, Rémy Heitz, y avait vu un « risque d’obstacle à la sérénité » et donc « d’atteinte à l’indépendance des magistrats » avant le procès en appel.
Le procès en appel attendu en mars
Parmi les trois condamnés avec mandat de dépôt par le jugement du 25 septembre, la cour d’appel a déjà mis en liberté sous contrôle judiciaire l’ex-banquier Wahib Nacer, 81 ans, mais a maintenu en détention l’intermédiaire Alexandre Djouhri. Pour ce dernier, condamné à six ans d’emprisonnement avec incarcération immédiate et 3 millions d’euros d’amende, la cour a considéré qu’il présentait des garanties « particulièrement faibles » face à son risque de fuite.
Dans son cas, la justice a également considéré que « les risques de pressions continuent d’exister » sur des témoins de l’affaire, notamment l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi, Bechir Saleh, condamné dans le dossier et en fuite.
Dans les deux cas, le président Olivier Géron a précisé au préalable qu’en statuant sur une demande de mise en liberté « les critères d’appréciation de la juridiction d’appel sont nécessairement différents de ceux de la juridiction de premier degré » et que ces décisions ne présageaient en rien de l’issue du procès en appel, qu’il devrait diriger.
Très attendu, ce nouveau procès libyen devrait se tenir à partir du mois de mars, même si les dates précises n’ont pas encore été officiellement annoncées.









