« Je ne suis pas un habitué des manifestations mais là, on vit un moment effrayant », s’inquiète Gaspard à Clermont-Ferrand
A Clermont-Ferrand, la manifestation intersyndicale, partie de la place du 1er-Mai vers 10 h 30, a rassemblé 5 000 personnes selon les estimations du journal local La Montagne. La veille, le mouvement Bloquons tout a placardé dans la ville huit mandats populaires qui somment le Commissariat « d’arrêter les contrôles d’identité au faciès », le Centre des finances publiques de Clermont-Ferrand de « prélever la taxe Zucman et l’impôt sur la fortune à tous les citoyen.nes concerné.es du Puy-de-Dôme », etc.
« L’idée est de poser la question de qui prend les décisions. Est-ce que le fonctionnement actuel a plus de légitimité que les décisions prises par les assemblées populaires ? », explique Loulou, cadre supérieure, mère célibataire et militante de longue date, qui ne souhaite pas donner son vrai nom. « Les mandats s’adressent aux institutions mais aussi aux manifestants qui peuvent reprendre ces idées, voire proposer d’autres mandats », poursuit-elle.
L’ambiance est festive dans le cortège mais la colère est vive. « J’étais là le 10 septembre et je suis révolté par les violences policières. Tout était calme, il y avait des enfants. Je ne comprends pas. Je manifeste souvent et je n’avais jamais assisté jusque-là au lancement de gaz lacrymogène », se révolte François, professeur de math de 52 ans qui insiste également sur le déni de démocratie auquel fait face le pays avec Emmanuel Macron au pouvoir. « Désormais, je ne raterai plus aucune manifestation », promet-il.
Gaspard, musicien de 31 ans, fait le même constat. « Je ne suis pas un habitué des manifestations mais là, on vit un moment effrayant. Le peuple place le NFP [Nouveau Front populaire] en tête et on se retrouve avec des gouvernements du bloc macroniste », s’insurge-t-il.
Pascal, technicien de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE), syndiqué, n’a pas participé au mouvement du 10 septembre parce que Jean-Luc Mélenchon lui « donne des boutons ». « Je suis de gauche, d’extrême gauche même comme disent les médias, mais Mélenchon torpille les actions des autres pour exister », explique-t-il. S’il souhaite manifester, c’est pour de nombreuses raisons mais il s’inquiète par-dessus tout pour les générations futures parce que « l’argent régule tout ».
Malika, 37 ans, s’insurge, elle aussi, contre les écarts qui se creusent entre les riches et les pauvres. Elle se dit à ce titre contente de l’ampleur prise par la manifestation, qu’elle estime plus importante que d’ordinaire. Ghislain Dugourd, secrétaire général de l’Union départementale de la CGT dans le Puy-de-Dôme, qui dénombre 6 000 à 7 000 manifestants, est également satisfait. « C’est le double des chiffres que l’on a le 1er-Mai », compte-t-il. Mais Laurent Membré, secrétaire général CGT du site de l’AIA (Atelier industriel de l’aéronautique) de Clermont-Ferrand, lui, ne cache pas sa déception. « Je m’attendais à 10 000 personnes vu le contexte », regrette-t-il.
Arrivé deux heures plus tard sur la place de Jaude, le cortège a été rejoint par une vélorution, autrement appelée « cortège à roulette », organisée en parallèle par le mouvement Bloquons tout. Puis les syndicats volontaires ont été reçus par le préfet Joël Mathurin. « C’est inhabituel. D’ordinaire, on nous propose uniquement de rencontrer le ou la directrice de cabinet. C’est un signe que le gouvernement démissionnaire est fébrile », estime Ghislain Dugourd. Sans grande surprise, après une heure d’échange, le préfet a promis de faire remonter les revendications au futur premier ministre…