Au cinéma, le passé vient parfois à la rescousse du présent, comme en ce morne été 2025, où les restaurations ont compensé le calme plat des sorties. La formule convient bien à Marleen Gorris, cinéaste néerlandaise née en 1948, active jusqu’en 2017, et dont les films, longtemps boudés et contestés, trouvent peut-être aujourd’hui un terrain théorique plus favorable. Première réalisatrice « oscarisée » de l’histoire pour Antonia et ses filles (1995) – Oscar du film étranger en 1996 et sorti en France en 1997 –, Gorris ne s’est pas attiré les bonnes grâces de la cinéphilie, beaucoup plus des cercles féministes qui ont reconnu en elle une pionnière, dans une acception offensive, polarisante, ouvertement conflictuelle du champ.
On peut désormais en juger par ses deux premiers films, Le Silence autour de Christine M. (1982) et Miroirs brisés (1984), qui sortent inédits sur les écrans français en version restaurée. Ils révèlent une agitatrice considérable : ni matraqueuse de messages (comme s’en effarouchent les cinéphiles), ni pourvoyeuse de modèles « positifs » lénifiants. Mais artiste en colère, sachant donner à celle-ci une forme froide et réflexive, aussi clivante que clivée.
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