Quatre hommes de nationalité bulgare seront jugés à l’automne par le tribunal correctionnel de Paris dans l’affaire des mains rouges taguées sur le Mémorial de la Shoah en mai 2024, a déclaré samedi 26 juillet le parquet, confirmant une information de Franceinfo.
Une juge d’instruction a ordonné jeudi que trois suspects soient jugés pour dégradations en réunion et en raison de la prétendue appartenance à une race, ethnie ou religion, ainsi que pour association de malfaiteurs, a-t-il détaillé. La quatrième personne, soupçonnée « d’avoir effectué les réservations d’hébergement et de transports des auteurs principaux, est poursuivie pour la complicité des dégradations aggravées et pour association de malfaiteurs », a-t-il ajouté.
Une première audience est fixée au 11 septembre, le procès au fond pourrait se tenir à la fin d’octobre. Trois suspects sont en détention provisoire depuis leur extradition de Croatie et de Bulgarie, « la quatrième personne, en fuite, fait l’objet d’un mandat d’arrêt et pourra être jugée en son absence », a précisé le parquet. Ils encourent sept ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
Dizaines de tags
« L’instruction n’a malheureusement pas permis la mise en cause du principal suspect, toujours en fuite et dont l’absence est un vrai problème », a réagi, auprès de l’Agence France-Presse, Martin Vettes, avocat de l’un des suspects : « Mon client attend son procès avec impatience depuis de longs mois. »
Pendant la nuit du 13 au 14 mai 2024, 35 tags représentant des mains rouges – symbole pouvant être lié au lynchage de soldats israéliens à Ramallah, en Cisjordanie, en 2000 – ont été peints sur le mur des Justes du Mémorial de la Shoah à Paris.
Un agent de sécurité du site « avait surpris deux personnes » en train d’« apposer des pochoirs, et [prenant] la fuite à son arrivée », a relaté le parquet. Il leur est également reproché « plusieurs dizaines de tags similaires » sur des murs des 4e et 5e arrondissements de la capitale.
Les suspects ont été identifiés grâce à l’analyse des images de vidéosurveillance et de leurs lignes téléphoniques, et par des réservations de vols et d’un hôtel. Trois d’entre eux avaient pris un bus pour Bruxelles le 14 mai, juste après les faits, puis un vol pour Sofia.
Une opération de déstabilisation attribuée à la Russie
Au cours de l’information judiciaire s’est dessinée « l’hypothèse que cette action était susceptible de correspondre à une action de déstabilisation de la France orchestrée par les services de renseignement russe », a affirmé le parquet.
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Cette action s’intégrait dans « une stratégie plus large visant à diffuser de fausses informations et également à diviser l’opinion française ou attiser les tensions internes en faisant appel à des “proxies”, c’est-à-dire des personnes qui ne travaillent pas pour ces services mais sont rémunérées par eux pour des tâches ponctuelles par le biais d’intermédiaires, notamment dans des pays voisins de la Russie », a-t-il ajouté.
Le service Viginum, chargé de la lutte contre les ingérences numériques étrangères, avait observé « une instrumentalisation » de cette affaire « par des acteurs liés à la Russie ». Cette opération avait été « conduite par le dispositif d’influence russe RRN à travers un réseau de plusieurs milliers de comptes inauthentiques sur Twitter et par un pseudo-média français créé par RRN intitulé Artichoc », selon le parquet.