Le Cambodge a réclamé, vendredi 25 juillet, un « cessez-le-feu immédiat » et « inconditionnel » avec la Thaïlande lors d’une réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU) relative aux affrontements entre les deux voisins, qui ont fait 33 morts, a annoncé son ambassadeur auprès de l’ONU.
Phnom Penn a « appelé à une résolution pacifique du conflit », a également déclaré Chhea Keo à quelques journalistes à l’issue de cette réunion à huis clos. « Comment peuvent-ils [les Thaïlandais] nous accuser, nous un petit pays avec une armée trois fois plus petite et sans force aérienne », d’attaquer « un grand voisin », a-t-il ajouté.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a, de son côté, « appelé les deux parties à une retenue maximale et à une solution diplomatique ». Aucun autre participant à cette réunion d’urgence, demandée par le premier ministre cambodgien, Hun Manet, n’a souhaité s’exprimer.
Le différend frontalier entre les deux pays donne lieu à un niveau de violence qui n’avait plus été vu depuis 2011, impliquant des avions de combat, des tanks, des troupes au sol et des tirs d’artillerie dans plusieurs endroits disputés.
Samedi, le ministère de la défense cambodgien a annoncé que 13 personnes avaient été tuées et 71 autres blessées du côté cambodgien. L’armée thaïlandaise a, pour sa part, fait état de cinq soldats tués vendredi, ce qui porte le bilan à 20 morts du côté thaïlandais – 14 civils et six militaires. Au total, le bilan dépasse désormais celui de la précédente série d’affrontements frontaliers majeurs survenue entre les deux pays, lesquels avaient fait 28 morts entre 2008 et 2011.
Loi martiale dans les districts thaïlandais frontaliers
Les deux camps ont signalé des heurts vers 5 heures, heure locale, samedi (minuit à Paris). Phnom Penh a accusé les forces thaïlandaises d’avoir tiré « cinq obus d’artillerie lourde » contre plusieurs lieux de la province de Pursat, frontalière de la Thaïlande.
Les affrontements ont contraint plus de 138 000 personnes à évacuer les régions thaïlandaises adossées à la frontière, tandis qu’au Cambodge plus de 35 000 personnes ont dû fuir leur domicile.

Vendredi, avant la tenue du Conseil de sécurité de l’ONU, la Thaïlande avait dit laisser la porte ouverte à des négociations, avec la Malaisie comme possible intermédiaire. « Nous sommes prêts. Si le Cambodge souhaite régler cette question par la voie diplomatique, de manière bilatérale, ou même par l’intermédiaire de la Malaisie, nous sommes prêts à le faire. Mais jusqu’à présent nous n’avons reçu aucune réponse », avait déclaré à l’Agence France-Presse le porte-parole du ministère des affaires étrangères thaïlandais, Nikorndej Balankura.
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La Malaisie préside actuellement l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Asean), dont la Thaïlande et le Cambodge sont membres.
Un peu plus tôt, le premier ministre thaïlandais par intérim, Phumtham Wechayachai, avait prévenu que l’aggravation des affrontements pourrait conduire à « une guerre ». Le pays a décrété, vendredi 25 juillet, la loi martiale dans huit de ses districts frontaliers avec le Cambodge.
Pékin qualifie les affrontements de « déchirants »
Le ministre des affaires étrangères chinois, Wang Yi, a qualifié, vendredi, de « déchirants et d’inquiétants » les affrontements meurtriers. « Ce problème trouve ses racines dans les séquelles des colonisateurs occidentaux et doit maintenant être abordé avec calme et géré de manière appropriée », a déclaré Wang Yi au secrétaire général de l’Asean, Kao Kim Hourn, à Pékin, selon un communiqué de la diplomatie chinoise.
Les deux pays s’accusent mutuellement d’avoir ouvert le feu et défendent leur droit à la légitime défense. Bangkok a aussi accusé ses adversaires de cibler des infrastructures civiles, par exemple un hôpital et une station-service, ce dont Phnom Penh s’est défendu. La Thaïlande a également déployé plusieurs avions de combat F-16 pour frapper ce qu’elle a présenté comme des cibles militaires cambodgiennes.
Bangkok et Phnom Penh sont engagés dans un bras de fer depuis la mort d’un soldat khmer à la fin de mai, lors d’un échange de tirs nocturne dans une zone de leur frontière commune surnommée le « Triangle d’émeraude ». Les deux pays contestent le tracé de cette frontière, définie à l’époque de l’Indochine française. Le tribunal des Nations unies a, par deux fois, donné raison au Cambodge, en 1962 et en 2013, quant à la propriété du temple, classé au Patrimoine mondial par l’Unesco, et d’une zone alentour.


Mercredi, Bangkok a rappelé son ambassadeur à Phnom Penh et expulsé de son territoire l’ambassadeur cambodgien, après qu’un soldat thaïlandais a perdu une jambe en marchant sur une mine. Une enquête de l’armée thaïlandaise a permis de déterminer que le Cambodge avait posé de nouvelles mines à la frontière, selon Bangkok. Le Cambodge a rejeté ces accusations et affirmé que des zones frontalières restent infestées de mines actives datant de « guerres du passé ». Les Etats-Unis, la France, l’Union européenne et la Chine ont tous appelé au dialogue et à la fin du conflit.