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C’est une première depuis 1923 : à partir de samedi 5 juillet, les Parisiennes et les Parisiens peuvent se baigner légalement dans la Seine. Jusqu’au 31 août, trois sites sont ouverts gratuitement chaque jour, dans le cadre de l’opération Paris Plages. Présentée comme un héritage des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, l’autorisation de baignade dans le fleuve de la capitale participe d’une démarche d’« adaptation au changement climatique, mais aussi de qualité de vie », avait expliqué la maire (PS) de Paris, Anne Hidalgo, lors d’une conférence de presse, à la mi-mai.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Trois sites de baignade dans la Seine à Paris ouvriront cet été, du 5 juillet au 31 août

La qualité de l’eau de la Seine sera surveillée de manière étroite et quotidienne grâce à des capteurs, et signalée par un système de drapeaux. En cas de pollution, notamment après de fortes pluies, la baignade sera interdite. Des analyses renforcées de bactéries fécales, comme Escherichia coli (E.coli) et les entérocoques, seront menées par l’agence régionale de santé, selon les seuils sanitaires en vigueur.

Pour autant, la tentation de se baigner en dehors des zones autorisées, à Paris comme ailleurs dans l’Hexagone, peut être forte, surtout lors des pics de chaleur. Quels sont exactement les risques encourus en s’exposant à une eau impropre à la baignade ?

Il existe trois grandes catégories de dangers :

  • topologiques, liés au courant et à la configuration des lieux ;
  • bactériologiques, associés aux contaminations par des micro-organismes nocifs ;
  • chimiques, liés aux différents types de pollution.

Gare aux courants indétectables depuis la surface

Le risque topologique est le plus évident. Il dépend directement de la configuration du site (profondeur de l’eau, aménagement des berges, force du courant…) et peut mener à des accidents mortels. Selon Santé publique France, les noyades accidentelles sont responsables chaque année d’environ 1 000 morts (dont environ un quart dans les cours et les plans d’eau), soit la première cause de mortalité par accident de la vie courante chez les moins de 25 ans. A l’évidence, « il est fortement déconseillé de se baigner s’il y a un fort courant », rappelle Marc Valmassoni, coordinateur de campagne de l’organisation non gouvernementale (ONG) Surfrider, qui surveille les eaux de loisir et milite pour leur meilleure qualité.

Certains fleuves, du reste interdits à la baignade, sont tout particulièrement dangereux. C’est le cas de la Loire, qui présente d’importantes variations de débit, des sables friables et des tourbillons susceptibles de piéger les nageurs. Les drames sont également fréquents dans le Rhône et la Saône, à Lyon, en raison de puissants courants sous-marins insoupçonnables depuis la surface. D’une manière générale, il faut à tout prix éviter de se baigner près des ouvrages d’arts comme les ponts, vecteurs de tourbillons, ou aux alentours des barrages et des écluses, où les manœuvres d’embarcations entraînent de forts courants pouvant prendre au piège les nageurs.

En mer et particulièrement sur les côtes du Sud-Ouest, les baïnes – des dépressions sur la plage qui engendrent de forts courants avec la marée – entraînent les nageurs vers le large. Au risque de s’épuiser très rapidement, il ne faut pas essayer de nager à contre-courant, mais se laisser emporter au large et nager parallèlement à la plage quand le courant s’atténue, afin d’en sortir. Dans les terres, le risque est également accru dans les gravières et les carrières, où des effondrements dans le fond peuvent créer des tourbillons qui aspirent les baigneurs.

Des risques bactériologiques allant jusqu’à l’intoxication

La deuxième catégorie de risque correspond aux micro-organismes qui prolifèrent dans l’eau. « On est beaucoup plus exigeants pour des eaux potables et des eaux de piscine que pour une eau de baignade », alerte Bernard Legube, professeur émérite à l’université de Poitiers, spécialiste en physico-chimie des eaux et traitement des eaux.

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Leur concentration dans les fleuves augmente après de fortes pluies. Elles peuvent faire déborder les stations d’épuration et engendrer un débordement des eaux usées et le ruissellement des eaux de surface et de leurs déchets. La plage de l’Huveaune, à Marseille, proche de l’embouchure du fleuve côtier du même nom, est même surnommée « Epluchures Beach ». « Dès qu’il pleut, ça ravine, c’est cracra. Il faut éviter de se baigner dans un fleuve côtier après les pluies », conseille Marc Valmassoni.

Par ailleurs, les algues ou les microalgues se multiplient avec les grandes chaleurs, phénomène accentué par le réchauffement climatique. Les conséquences varient selon les micro-organismes et le temps d’exposition.

Elle est le plus souvent causée par des bactéries présentes dans les matières fécales, comme Escherichia coli et les entérocoques, qui se retrouvent reversées dans les eaux fluviales, notamment après de fortes pluies. C’est pour cette raison que de nombreux entraînements avaient été annulés en amont des épreuves de natation en eau libre des Jeux de Paris 2024, d’importants orages ayant détérioré la qualité de l’eau du fleuve.

Le ministère de la santé tient à jour un site sur lequel il est possible de se renseigner sur la qualité des eaux de baignade, selon les résultats des dernières analyses qui y ont été pratiquées.

  • La dermatite du baigneur, ou « puce du canard »

Des démangeaisons de la peau gênantes, mais bénignes, peuvent apparaître après une baignade estivale dans un plan d’eau où vivent des oiseaux aquatiques et des escargots d’eau. Elles sont causées par les larves de la cercaire, un parasite présent notamment chez les canards colverts et les cygnes. La dermatite du baigneur est assez rare. Il est recommandé de se doucher immédiatement après la baignade et de bien se sécher pour limiter les risques.

Elle est transmise par l’urine des rongeurs, qui contaminent rivières et étangs. La plupart du temps bénigne chez l’homme, cette maladie peut dans certains cas conduire à des insuffisances rénales graves, selon l’Institut Pasteur. Les symptômes les plus communs sont des vomissements, de la fièvre, des maux de tête et la diarrhée. Si vous pratiquez des activités aquatiques en eau douce, il est conseillé de désinfecter et protéger les plaies, laver ses mains et éviter tout contact avec ses yeux, sa bouche et son nez, et porter des équipements de protection.

  • Une intoxication aux toxines de cyanobactéries

Irritations cutanées, troubles digestifs, voire nerveux… Ce sont les signes d’une intoxication aux cyanobactéries, des bactéries qui prolifèrent avec la chaleur. Plusieurs cas de décès ont été rapportés chez des chiens. Il est préférable d’éviter la baignade si l’eau tourne au vert ou si un film brun s’y accumule. Parfois, les cyanobactéries forment aussi des amas ressemblant à des algues. Le risque est particulièrement élevé dans les lacs, moins oxygénés, notamment dans le sud de la France, mais elles se développent aussi dans des rivières à faible débit, comme le Tarn.

La pollution, catégorie de risque la plus mal connue

Rejets chimiques, pesticides, molécules médicamenteuses… De nombreuses activités humaines influent directement sur la qualité des cours d’eau, avec deux grandes inconnues : à quel niveau de concentration, et pour quelles conséquences ?

Dans certains cas extrêmes, on sait que la pollution d’un cours d’eau est associée à de lourdes conséquences sanitaires. C’est le cas en Chine, où plus de 450 hameaux ont vécu durant des années avec de l’eau potable contaminée par les usines en amont. Ces eaux polluées ont conduit à des taux de cancer de 50 % plus élevés que dans le reste du pays.

En France, les situations aussi extrêmes sont rares. « Dans la Seine, il y a quelques traces de pesticides, essentiellement des herbicides, mais qui sont très faibles », expose Bernard Legube. Le risque est inversement proportionnel au débit. Dans une eau courante, entre les courants, l’oxygénation et la dilution dans les rivières, la pollution ne reste pas longtemps présente, précise le chercheur.

Actuellement, il n’existe pas de suivi précis au niveau national de la pollution chimique. « C’est coûteux à mettre en place et les enjeux ne sont pas les mêmes d’une région à l’autre », explique Marc Valmassoni. L’ONG Surfrider milite pour leur prise en compte dans la prochaine révision de la directive européenne sur la qualité des eaux de baignade.

Mise à jour, le 5 juillet 2025, à l’occasion de l’ouverture de sites de baignade dans la Seine.

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