« Manque d’ambition », « imposture »… l’annonce, par Emmanuel Macron, de la limitation du chalutage de fond dans les aires marines protégées (AMP) françaises a suscité un fort scepticisme parmi les ONG environnementales, même si certaines saluent « un bon premier pas ».
« Le président a mis en scène l’annonce… du statu quo ! », a vilipendé l’association Bloom dans un communiqué diffusé dimanche 8 juin, estimant qu’Emmanuel Macron avait « confirmé que l’imposture de la politique de protection maritime de la France se poursuivrait, à savoir qu’il n’existerait jamais de cadre contraignant pour protéger véritablement les aires marines dites “protégées”. »
Dans un entretien à la presse régionale, dont Ouest-France, donné à la veille du sommet de Nice sur les océans, M. Macron a annoncé une limitation du chalutage de fond dans certaines zones des AMP françaises. Il a admis que cette technique de pêche, qui racle le fond de la mer, « vient perturber la biodiversité et des écosystèmes qu’il faut apprendre à protéger ».
« Il y a un tout petit peu de progrès sur la formulation : le chalutage de fond a pris la place qu’il mérite » dans la communication gouvernementale, a souligné, auprès de l’Agence France-Presse (AFP), François Chartier, de Greenpeace. Cependant, « on a l’impression qu’il annonce qu’il ne va rien annoncer », a-t-il ajouté, déplorant le « peu d’ambition » des déclarations du président. Greenpeace plaide pour une interdiction du chalutage de fond dans 30 % des eaux françaises classées en aires marines protégées.
« Un bon premier pas » pour l’ONG Oceana
L’ONG Oceana a salué, pour sa part, « un bon premier pas », selon les mots de son porte-parole, Nicolas Fournier, car « jusqu’à présent, c’était tabou de parler de ces questions-là ». Le chalutage de fond a été pratiqué 17 000 heures durant dans les aires marines protégées françaises en 2024, selon un rapport publié en mai par Oceana, qui appelle à bannir la pratique.
M. Fournier remarque que M. Macron a cité dans son interview l’AMP de Port-Cros (Var), « où il n’y a déjà pas de chalutage ». « Si on décide de l’interdire, l’impact sera minimal pour la biodiversité », a-t-il pointé auprès de l’AFP. « Interdire le chalutage de fond dans une aire marine protégée ne la rend pas en “protection stricte”, car il faudrait pour cela y interdire toutes les activités extractives, y compris la pêche », ajoute-t-il. A ce jour, 33 % des eaux françaises sont couvertes par au moins une AMP, mais la plupart d’entre elles autorisent toutes les pratiques de pêche.
M. Macron a annoncé le renforcement de la protection de ces AMP pour atteindre l’objectif européen de placer sous protection forte 10 % de son domaine maritime « dès le 1er janvier 2026 », avec quatre ans d’avance sur le délai fixé. Par cette communication, le président français s’attribue les annonces du président de la Polynésie française, qui doit annoncer à Nice « la création d’une vaste aire marine protégée de 5,5 millions de kilomètres carrés, dont 1,1 million de kilomètres carrés sous protection stricte », accuse l’ONG Bloom.
Les zones sous protection haute ou intégrale, le niveau le plus strict de protection, plafonnent actuellement à 2,6 % du domaine maritime français, et sont quasi exclusivement situées outre-mer.