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Le pari était risqué, le résultat s’est révélé cruel. Pour tenter de renouer le fil avec les Français après la désastreuse dissolution de juin 2024, Emmanuel Macron avait opté, mardi 13 mai, sur TF1, pour un format particulièrement long : plus de trois d’heures d’émission, ponctuées d’interventions d’élu (Robert Ménard, le maire DVD de Béziers), de syndicaliste (Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT), de membres de la société civile, parmi lesquels la lobbyiste libérale Agnès Verdier-Molinié.

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Profils tranchés, tons de procureur, les échanges ont viré au désavantage du chef de l’Etat, qui s’est retrouvé acculé sur pratiquement tous les aspects de son action : emploi, retraite, fiscalité, sécurité, immigration, au point d’apparaître très seul en fin d’émission lorsqu’il a vanté le « tous ensemble », la France qui gagne, celle de Notre-Dame ou des Jeux olympiques. Si l’idée était de s’inspirer du grand débat post-« gilets jaunes », qui, en 2019, dans l’adversité, lui avait plutôt bien réussi, l’échec, cette fois, est patent.

On attendait des annonces à propos de l’usage du référendum. Emmanuel Macron est resté vague, comme si rien n’était mûr. Certes, sa volonté reste d’organiser plusieurs référendums « en même temps » dans les « mois qui viennent » sur de « grandes réformes économiques, éducatives ou sociales », ou « institutionnelles », mais il s’est refusé à en fixer par avance les sujets, se contentant de préciser que, sur la fin de vie, il pourrait en appeler aux Français en cas de désaccord entre l’Assemblée nationale et le Sénat.

Rien de clair non plus à propos de la demande de son premier ministre d’en organiser un sur le plan de redressement des finances publiques. Emmanuel Macron n’a pas désavoué François Bayrou. Il lui a renouvelé sa confiance dans la tourmente de l’affaire de Bétharram, mais sans répondre à sa requête, tout en signalant que la fiscalité et le budget relevaient de la compétence du Parlement.

Les certitudes présidentielles à propos du référendum ne sont, à ce stade, que négatives : contrairement à la droite, il ne veut pas de référendum sur l’immigration et, contrairement à la gauche, il n’en souhaite pas non plus sur la réforme des retraites. Contre vents et marées, il défend sa ligne économique : travailler plus, produire plus, ne pas augmenter les impôts, comme s’il s’agissait de prendre date non pas pour maintenant mais pour l’avenir.

L’émission embrassait large, trop large, mais ce n’est pas uniquement pour cette raison qu’Emmanuel Macron a eu du mal à convaincre. Sur l’Ukraine, la pédagogie présidentielle, nourrie par l’action, a fonctionné ; sur Gaza, la condamnation s’est voulue implacable : « Ce que fait Benyamin Nétanyahou est une honte. » Sur la scène intérieure, en revanche, la parole présidentielle a peu porté parce que, devant la somme des problèmes à régler, le chef de l’Etat n’est pas apparu mieux armé que son premier ministre pour persuader le pays d’entreprendre les lourds ajustements à venir.

La proposition d’une conférence sociale pour revoir le financement du modèle social, alléger les charges sur le travail et peut-être augmenter l’impôt sur la consommation ne s’est accompagnée d’aucune injonction à conclure : pas de majorité à l’Assemblée nationale, des partenaires sociaux divisés, un pays qui broie du noir… L’équation, en un an, n’a pas bougé. L’exécutif est embourbé. Sous le prétexte que sa popularité remontait légèrement, Emmanuel Macron a cru bon de s’exposer prématurément. Il a pris le risque de mettre en lumière l’impuissance présidentielle. Pour lui, comme pour la fonction, mieux aurait valu rester aux abris.

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Le Monde

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