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La justice a laissé se poursuivre, vendredi 18 avril, la construction d’un centre de tri des déchets à Monte, en Haute-Corse, rejetant le recours en référé d’associations de défense de l’environnement dans une île engluée depuis des décennies dans une crise des déchets.

Le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a rejeté la demande de suspension du permis de construire du centre de tri et de valorisation (CTV) de déchets délivré au Syndicat de valorisation des déchets de la Corse (Syvadec), estimant que « la condition d’urgence » pour interrompre les travaux dans l’attente d’une décision au fond sur la validité du permis de construire « n’était pas remplie ».

Le projet présente « un intérêt public » et son exécution ne porte « pas atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation des requérants ou aux intérêts qu’ils entendent défendre », a-t-il argumenté.

Une décision qui « décide de la politique des déchets en Corse pour les vingt prochaines années », a regretté Me Benoist Busson, avocat des cinq associations de défense de l’environnement et de six agriculteurs exploitant des terrains voisins, dénonçant « un projet illégal ». Mercredi, à l’audience, l’avocat avait assuré qu’il n’y avait « pas pire endroit » que ce terrain de 5 hectares, hébergeant « 65 espèces protégées », pour construire ce centre qui devrait traiter d’ici à 2027 98 000 tonnes de déchets de Haute-Corse et d’une partie de la Corse-du-Sud.

Après traitement, 38 % devraient être recyclés ou compostés, 19 % transformés en combustibles solides de récupération (CSR), 15 % réduits par perte en eau et 28 % enfouis, selon le Syvadec, pour qui ce centre permettra de « diminuer le tonnage annuel de déchets ménagers enfouis de 25 % en Corse ».

Classé en zone naturelle par la carte communale et en espace stratégique agricole (ESA) par le plan d’aménagement et de développement durable de la Corse (Padduc) de la Collectivité de Corse, ce projet, frappé d’un avis défavorable du Conseil national de la protection de la nature (CNPN), va entraîner « de graves atteintes à l’environnement et à l’agriculture », avait assuré MBusson.

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Un coût de 79 millions d’euros

Les avocats de la commune, du Syvadec et du groupement d’entreprises privées titulaire du marché avaient assuré que « l’intérêt général s’opposait à la suspension » des travaux. Réalisée sur un terrain « inexploité depuis 1973 », cette construction a reçu « 13 avis favorables » sur 14, avaient-ils argumenté.

Elle doit coûter 79 millions d’euros, financés à 80 % par l’Etat et à 20 % par le Syvadec, montant jugé exorbitant par les associations environnementales, qui dénoncent l’attribution de ce marché public à des entreprises privées, plus sujettes aux pressions criminelles, selon les collectifs antimafia de l’île. S’ajoutent 188 millions d’euros pour l’exploitation pendant dix ans du centre par un groupement d’une dizaine d’entreprises privées, le maître d’ouvrage restant le Syvadec.

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Une enquête préliminaire du Parquet national financier (PNF) a d’ailleurs été ouverte en novembre 2024 pour, notamment, entente et favoritisme, avec des perquisitions effectuées, entre autres, début mars au Syvadec, a précisé à l’Agence France-Presse une source judiciaire. « A ce stade des investigations, aucun élément ne vient confirmer les éléments allégués dans la plainte d’une association à l’origine de l’enquête », selon cette source.

L’île de 360 000 habitants peine depuis une vingtaine d’années à gérer ses déchets, en l’absence d’incinérateur et avec seulement deux centres d’enfouissement, visés presque chaque année par des réquisitions préfectorales pour augmenter leur capacité d’enfouissement.

La Corse, « première région métropolitaine en termes de production de déchets ménagers et assimilés (DMA) par habitant » en 2021, a un coût de gestion des déchets qui représente « deux à trois fois celui de la moyenne nationale », a regretté en juillet la chambre régionale des comptes. En 2024, sa production de déchets a encore augmenté de 2 %, à 632 kg/habitant avec seulement 39 % de tri, selon les derniers chiffres officiels.

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Le Monde avec AFP

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