Le Parlement a adopté définitivement, mardi 18 mars, un texte visant à renforcer la sécurité dans les transports, très attendu des professionnels, mais dont certaines mesures sont décriées par la gauche, comme le renforcement des prérogatives des forces de sécurité de la SNCF et de la RATP.
Après avoir obtenu l’aval du Sénat lundi, le texte a été adopté par un dernier vote à l’Assemblée nationale, par 303 voix contre 135, avec le soutien de la coalition gouvernementale, de l’alliance RN-ciottistes et d’une bonne partie des indépendants du groupe LIOT.
Le texte élargit notamment les prérogatives des forces de sécurité dans les transports (sûreté ferroviaire pour la SNCF ; GPSR pour la RATP), qui pourront procéder à des palpations sans avoir besoin de l’accord des préfets, intervenir aux abords des gares, ou encore saisir des objets considérés comme potentiellement dangereux. « Il était temps de donner des droits aux agents de sûreté, car il n’est pas possible de leur demander d’assurer la sécurité des utilisateurs des transports en commun sans leur en donner les moyens nécessaires », s’est félicité le député Les Républicains Ian Boucard.
La gauche a, au contraire, dénoncé un glissement des missions régaliennes. « Les frontières entre les compétences des agents de sûreté et celles des forces de l’ordre s’atténuent dangereusement », a déploré le député communiste Stéphane Peu.
Déjà adoptée au Sénat en février 2024
Le texte contient aussi la pérennisation du port de caméras-piétons par les contrôleurs. Une expérimentation de ce dispositif plébiscité par la profession a pris fin le 1er octobre. La proposition de loi ouvre, en outre, une expérimentation similaire pour les chauffeurs de bus et de car.
La France insoumise (LFI), les socialistes, les communistes et les Ecologistes ont très largement voté contre. Seuls l’ancien président François Hollande et l’ancien ministre macroniste Aurélien Rousseau se sont abstenus au groupe PS.
« Je souhaite désormais une mise en œuvre rapide de ce texte », a déclaré le ministre des transports, Philippe Tabarot, sur le réseau social X. M. Tabarot avait la particularité d’être aussi à l’origine de la proposition de loi lorsqu’il était sénateur. Elle avait été adoptée pour la première fois au Sénat en février 2024. Son parcours législatif avait été stoppé par la dissolution en juin, puis par la censure du gouvernement de Michel Barnier, en décembre.
Le texte comporte aussi une gradation des amendes pour les bagages oubliés, et la possibilité pour un juge de prononcer une interdiction de paraître dans les réseaux de transports, similaire à celle qui existe pour les stades de football. Une mesure toutefois difficilement applicable, surtout dans le réseau francilien, de l’aveu même de Guillaume Gouffier Valente, député macroniste rapporteur du texte à l’Assemblée.
Vidéosurveillance algorithmique
Le texte contient « une espèce d’appétit de répression », a estimé le socialiste Roger Vicot.
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Une autre disposition, introduite par un amendement du gouvernement, a été très critiquée : elle proroge jusqu’à mars 2027 l’expérimentation d’un dispositif de vidéosurveillance algorithmique (VSA) lors de grands rassemblements, testé notamment lors des Jeux olympiques de Paris 2024. Avec la VSA, un algorithme analyse les images de vidéosurveillance afin de repérer des comportements suspects. Il s’agit d’un « cavalier » législatif sans lien suffisant avec le texte, selon certains députés, et donc susceptible d’être censuré par le Conseil constitutionnel.
« Cette expérimentation est bien plus large que les transports qui nous occupent aujourd’hui », a critiqué le député du groupe MoDem Philippe Latombe.
L’association La Quadrature du net a accusé le gouvernement, qui demande plus de temps pour avoir le recul nécessaire concernant cette technique, de « violer les promesses d’évaluation » et a déploré des « méthodes brutales (…) révélatrices de la dynamique autoritaire en cours ». « Brique après brique, vous bâtissez une France surveillée, punie, contrôlée, enfermée », a estimé la députée « insoumise » Elisa Martin, qui a défendu en ouverture de séance une motion de rejet du texte, largement repoussée par les députés.