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La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné la France, jeudi 27 février, pour l’opération de maintien de l’ordre menée par la gendarmerie qui a provoqué la mort de Rémi Fraisse en 2014, lors d’affrontements autour du chantier du barrage de Sivens (Tarn). La Cour estime que « le niveau de protection requis » pour parer les risques que comporte le « recours à une force potentiellement meurtrière » n’a pas été « garanti », et souligne des « lacunes du cadre juridique et administratif alors applicable » et des « défaillances de l’encadrement dans la préparation et la conduite des opérations litigieuses ».

« Il aura fallu plus de dix ans et l’appui de la Cour européenne des droits de l’homme pour que la responsabilité de l’Etat français dans la mort de Rémi Fraisse soit enfin reconnue. Que de temps perdu », a réagi auprès de l’Agence France-Presse (AFP) Patrice Spinosi, avocat de Jean-Pierre Fraisse, le père de la victime. « Le recours inapproprié à la force lors des manifestations contre le barrage de Sivens est désormais acquis. Pour éviter de nouvelles condamnations, la France doit maintenant tirer toutes les conséquences de cette décision et revoir en profondeur sa politique de maintien de l’ordre », a-t-il ajouté.

La CEDH était également invitée à se prononcer sur un deuxième aspect, à savoir si l’enquête pénale avait bien été « approfondie, indépendante et impartiale ». La cour de Strasbourg juge ici que « la procédure prise dans son ensemble n’est entachée d’aucun manquement à l’indépendance et à l’impartialité ». Elle salue particulièrement « la qualité des investigations réalisées par le défenseur des droits », qui avait notamment « auditionné le préfet et recueilli les réponses de son directeur de cabinet », auditions qui n’avaient pas été réalisées dans le cadre de l’enquête judiciaire menée par les juges d’instruction.

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Plus de 700 grenades tirées, dont 42 offensives

Elle relève par ailleurs que des « modifications substantielles » ont été mises en place face aux « lacunes législatives et réglementaires, organisationnelles et opérationnelles » qui avaient été relevées au cours de l’enquête. A l’époque, ces lacunes n’avaient pas été considérées comme constituant des infractions pénales. Aucun procès pénal n’avait été organisé à l’issue de l’enquête des juges d’instruction qui s’était soldée par un non-lieu. Cette décision avait été confirmée en appel puis en cassation, provoquant « une grande frustration » chez les proches de Rémi Fraisse. « Cela n’arrive jamais. Quand quelqu’un meurt, normalement, il y a un procès », confiait à l’AFP Claire Dujardin, avocate de plusieurs membres de la famille, quelques jours avant la décision de la CEDH.

Rémi Fraisse avait été tué par l’explosion d’une grenade offensive lancée par un gendarme lors d’affrontements avec des militants écologistes, dans la nuit du 25 au 26 octobre 2014. Cette nuit-là, les gendarmes avaient reçu ordre de « défendre et tenir la zone de vie sur le site de Sivens », le préfet Thierry Gentilhomme exigeant de leur part une « extrême fermeté », selon les déclarations du chef des gendarmes. L’exécutif avait plus tard assuré au contraire que des consignes « d’apaisement » avaient été passées. Selon un décompte officiel cité par Mediapart, la gendarmerie avait tiré plus de 700 grenades en tous genres, dont 42 offensives, au cours de la nuit d’affrontement.

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Le botaniste de 21 ans était « foncièrement pacifiste » selon ses proches, éloigné de toute activité militante. Il assurait bénévolement pour France Nature Environnement le suivi de la renoncule à feuille d’ophioglosse, une espèce végétale protégée.

Le Monde avec AFP

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