Les arbres photographiés par Mitch Epstein et présentés à la Gallerie d’Italia de Turin semblent tout prêts à vous chuchoter des histoires héritées de temps immémoriaux. Photographiés en couleurs et à la chambre, en majesté, dans de très grands formats, seuls ou parmi leurs congénères, avec leur ramure de dentelle, leurs troncs emberlificotés ou leur frondaison perdue dans les nuages, ces créatures hiératiques ont quelque chose de monuments antiques. Certains sont d’ailleurs plus âgés que les pyramides d’Egypte, comme le pin Bristlecone de Californie, surnommé « Mathusalem », peut-être le plus vieil arbre du monde avec ses presque 5 000 ans.
Séquoias, épicéas de Sitka, bouleaux jaunes, érables à grandes feuilles : le photographe, l’un des grands paysagistes de l’Amérique contemporaine, a parcouru son pays pendant plusieurs années en quête des old-growth forests, les forêts anciennes, ces très rares zones forestières intouchées, épargnées par l’activité humaine ou les tornades. Mais Mitch Epstein n’est pas un photographe de nature. Et, s’il n’est pas non plus un photojournaliste, tous ses paysages ont toujours eu des accents politiques. Pas question de laisser le spectateur s’abîmer dans une contemplation béate : la beauté qu’il dépeint est en sursis, condamnée par l’action de l’homme.
Il vous reste 80.55% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.