Il est curieux qu’en France le nom de Lou Grant rappelle vaguement quelque chose et que celui de Mary Richards n’évoque rien. Le Mary Tyler Moore Show n’a en effet jamais été diffusé sur nos écrans, contrairement à son spin-off masculin, que l’on a pu brièvement voir au milieu des années 1980. Un comble, quand on sait l’immense apport à la télévision que fut la sitcom créée en 1970 par James L. Brooks et Allan Burns, sur commande de Mary Tyler Moore et de son mari, Grant Tinker, pour leur maison de production, MTM, et la chaîne CBS.

Lire le billet (1977) : Article réservé à nos abonnés Les suffragettes du petit écran

Dans les pages du Monde, seul un billet de Claude Sarraute, publié en 1977 et intitulé « Les suffragettes du petit écran », donne une idée de l’importance qu’eut la série outre-Atlantique. « Curieux, ce phénomène auquel on assiste aux Etats-Unis, cette véritable dichotomie (…) entre le grand et le petit écran. Sur l’un, tout s’inscrit au masculin, et sur l’autre – ça, on le sait moins – au féminin », écrit la journaliste. Diffusée pour la première fois en juillet 1970, la sitcom et son générique iconique – l’héroïne jette son béret en l’air de joie pendant que Sonny Curtis chante « you’re gonna make it after all » (« tu vas y arriver après tout ») – ringardisent aussitôt toutes les femmes au foyer de la décennie précédente.

Le pilote de la série, d’une modernité inédite, est un programme à lui tout seul. On y rencontre Mary Richards, 30 ans et célibataire. A l’origine, les créateurs l’avaient imaginée comme une jeune divorcée, pour correspondre à la réalité de l’époque – les divorces explosent depuis le début des années 1960 –, mais CBS n’a pas suivi. La jeune femme vient de quitter New York pour Minneapolis (Minnesota), où elle décroche un emploi de productrice junior dans une chaîne d’information locale. Dans le même épisode, elle congédie définitivement son ex-fiancé venu la reconquérir, dans une scène devenue célèbre. « Prends soin de toi », lui dit-il avant de partir. « Je crois que c’est ce que je viens de faire », lui répond-elle. Le célibat assumé de Mary a beau parfois lui peser – elle aura son lot de déconvenues sentimentales et confiera sa fatigue après « vingt années de dating et… 2 000 rendez-vous (…), dont 90 % vraiment pourris ! » –, il deviendra une ligne directrice de la sitcom, jusqu’à faire capoter en fin de saison 7 une potentielle relation avec Lou, son patron.

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