Des personnes évacuées dans un gymnase sur le terrain de l’université Surindra Rajabhat dans la province frontalière thaïlandaise de Surin, le 25 juillet 2025.

Les affrontements meurtriers ont repris, vendredi 25 juillet, en plusieurs endroits le long de la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge. Depuis le début des violences cette semaine, plus de 138 000 civils ont été évacués côté thaïlandais, selon Bangkok qui s’inquiète d’incidents qui « pourraient devenir une guerre ». Le différend frontalier qui oppose ces deux pays d’Asie du Sud-Est donne lieu depuis deux jours à un niveau de violence jamais vue depuis 2011, impliquant des avions de combat, des tanks, des troupes au sol et des tirs d’artillerie dans plusieurs endroits disputés.

Le ministère thaïlandais de la santé a fait état de quinze morts dont un militaire, et plus d’une quarantaine de blessés côté thaïlandais. Le Cambodge déplore pour sa part un mort, un homme de 70 ans, et cinq blessés, a rapporté à l’Agence France-Presse le porte-parole de la province frontalière cambodgienne d’Oddar Meanchey (Nord-Ouest), dans ce qui constitue le premier bilan officiel cambodgien.

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A la demande du premier ministre cambodgien, Hun Manet, une réunion d’urgence du Conseil de sécurité de l’ONU est programmée vendredi à 15 heures (21 heures à Paris).

« Si la situation s’aggrave, elle pourrait devenir une guerre », a déclaré à des journalistes vendredi le premier ministre thaïlandais par intérim, Phumtham Wechayachai. Le ministère thaïlandais de la santé a affirmé vendredi que plus de 138 000 civils avaient été évacués des zones concernées, situées dans le nord-est du pays.

« Cessez-le-feu immédiat »

Dans la ville cambodgienne de Samraong, à 20 kilomètres de la frontière, des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP) ont entendu des tirs d’artillerie lointains vendredi matin. Plusieurs familles avec des enfants et leurs affaires à l’arrière de leur véhicule étaient en train de s’enfuir à toute vitesse. Les journalistes de l’AFP ont également vu des soldats se précipiter vers des lance-roquettes et se dépêcher en direction de la frontière.

Le premier ministre malaisien, Anwar Ibrahim, qui assure la présidence tournante de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Asean) dont la Thaïlande et le Cambodge sont membres, a affirmé jeudi soir avoir échangé avec ses homologues thaï et khmer. Le dirigeant, qui réclame un « cessez-le-feu immédiat » et la résolution pacifique des tensions, s’était félicité de « signaux positifs et [de] la volonté montrée par Bangkok et Phnom Penh pour envisager cette issue », dans un message sur Facebook.

La Thaïlande est « prête » à résoudre le conflit qui l’oppose au Cambodge par la voie diplomatique a déclaré vendredi, à l’AFP, le porte-parole du ministère des affaires étrangères thaïlandais, Nikorndej Balankura : « Nous sommes prêts, si le Cambodge veut résoudre cette question par des canaux diplomatiques, bilatéralement, ou même par l’intermédiaire de la Malaisie, nous sommes prêts à le faire. Mais jusqu’ici, nous n’avons reçu aucune réponse. »

Quelques heures après ce post, les combats ont repris dans trois zones vers 4 heures du matin (23 heures à Paris, jeudi), a affirmé l’armée thaïlandaise. Les forces cambodgiennes ont procédé à des bombardements à l’aide d’armes lourdes, d’artillerie de campagne et de systèmes de roquettes BM-21, a déclaré l’armée, et les troupes thaïlandaises ont riposté « avec des tirs de soutien appropriés ».

Appel au dialogue

Les deux pays s’accusent mutuellement d’avoir ouvert le feu en premier et défendent leur droit à la légitime défense. Bangkok a aussi accusé ses adversaires de cibler des infrastructures civiles comme un hôpital et une station-service, ce dont Phnom Penh s’est défendu. La Thaïlande a également déployé plusieurs avions de combat F-16 pour frapper ce qu’elle a présenté comme étant des cibles militaires cambodgiennes.

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Bangkok et Phnom Penh sont engagés dans un bras de fer depuis la mort d’un soldat khmer fin mai, lors d’un échange nocturne de tirs dans une zone de leur frontière commune surnommée le « Triangle d’émeraude ». Les deux pays contestent le tracé de cette frontière, définie à l’époque de l’Indochine française.

L’épisode moderne le plus violent lié à ce différend remonte à des affrontements autour du temple de Preah Vihear entre 2008 et 2011, qui avaient fait au moins 28 morts et des dizaines de milliers de déplacés. Le tribunal des Nations unies a donné raison au Cambodge deux fois, en 1962 et en 2013, sur la propriété du temple, classé au patrimoine mondial par l’Unesco, et d’une zone alentour.

Mercredi, Bangkok a rappelé son ambassadeur à Phnom Penh et expulsé de son territoire l’ambassadeur cambodgien, après qu’un soldat thaïlandais a perdu une jambe en marchant sur une mine à la frontière.

Une enquête de l’armée thaïlandaise a permis de déterminer que le Cambodge avait posé de nouvelles mines à la frontière, selon Bangkok. Le Cambodge a rejeté ces accusations et affirmé que des zones frontalières restent infestées de mines actives datant de « guerres du passé ». Les Etats-Unis, la France, l’Union européenne et la Chine ont tous appelé au dialogue et à la fin du conflit.

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Le Monde avec AFP

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