Depuis le rapport de la commission Stiglitz-Sen-Fitoussi de 2009, on sait que le produit intérieur brut (PIB) est une mesure biaisée de la performance économique. Il ignore notamment tant la détérioration du climat induite par les émissions de gaz à effet de serre que la baisse du capital naturel résultant du rétrécissement des espaces naturels et de la dégradation de la biodiversité. Mais on ne disposait pas jusqu’ici d’une mesure synthétique de ces dommages, et donc pas non plus d’une alternative au PIB.

C’est ce qui a conduit beaucoup de pays à mettre en place des tableaux de bord censés mieux refléter l’ensemble des conséquences de la croissance. En France, notamment, la loi Sas de 2015 impose au gouvernement de publier annuellement et de transmettre au Parlement une batterie d’indicateurs destinés à éclairer le débat public. En réalité, ces indicateurs n’ont jamais suscité que de l’indifférence générale, et le PIB a continué d’être la seule métrique par laquelle gouvernement, opposition et acteurs sociaux mesurent la performance économique du pays.

Faute de mieux, une controverse s’est alors nouée autour du thème de la décroissance. Elle met aux prises les tenants de celle-ci et les avocats de la croissance. Combat inégal, parce que la décroissance est un concept flou, dont la cible n’est pas quantifiée, et dont la séduction est fortement diminuée par le ralentissement actuel des gains de pouvoir d’achat. Un débat qui oppose les défenseurs du peu et ceux du « encore moins » a peu de chances de susciter l’intérêt des Français et de les détourner des sirènes populistes.

Si le terme de décroissance traduit un rejet louable du consumérisme effréné, il n’a macroéconomiquement pas de sens clair. En particulier, il ne propose pas une meilleure mesure de la performance économique et ne dit pas à quoi il faudrait allouer les gains de productivité dans un régime de décroissance.

Le débat public serait plus pertinent si les comptes nationaux produisaient deux mesures de la croissance : l’une traditionnelle (le PIB), l’autre corrigée des effets de l’activité économique sur le climat et la nature. Cet indicateur alternatif permettrait de mieux apprécier la performance économique du pays et inciterait les gouvernants à des politiques plus respectueuses de l’environnement.

Il vous reste 60.2% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Share.
Exit mobile version