
C’est une exposition coup de poing et coup de cœur que présente avec beaucoup de soin la jeune commissaire et historienne de l’art Elora Weill-Engerer à travers tout le rez-de-chaussée de la galerie Suzanne Tarasiève. On y plonge avec émerveillement dès la pièce-vitrine, qui présente le travail chatoyant de Romuald Jandolo : côté face, un portique surmonté de grands yeux de sequins a fière allure, mais révèle son désespoir côté pile. Posé sur une flaque de cotillons brillants, un cercueil noir recouvert de cabochons lumineux et de dessins ambivalents prend des airs de tour de magie ; une tenture brodée brandit une formule de Balzac comme un proverbe : « Le cœur se brise, le cœur se bronze. » Elle sert de passage vers l’arrière-galerie, où l’on découvre les poings charbonneux et tatoués de métal de Rudy Dumas, à l’art funambulesque, tout en lignes de force et équilibres délicats, et enfin les corps à corps sensuels avec les matières les plus polluées et cabossées de Charly Bechaimont. « Mange tes morts », cingle l’injure gitane. L’exposition la remet brillamment en perspective avec l’histoire des communautés du voyage, dont sont issus ces trois jeunes artistes habités.
« Les Rois morts ». Galerie Suzanne Tarasiève, 7, rue Pastourelle, Paris 3e. Jusqu’au 2 août.