Jeffrey Lewis, directeur du programme de non-prolifération en Asie de l’Est à l’Institut d’études internationales Middlebury à Monterey (Californie), revient sur l’opération « Rising Lion » lancée vendredi 13 juin par le gouvernement israélien de Benyamin Nétanyahou contre les infrastructures nucléaires et militaires iraniennes.

Les missiles israéliens ont touché Natanz en Iran, l’un des principaux sites d’enrichissement nucléaire du pays. Israël a aussi tué certains des meilleurs spécialistes nucléaires iraniens. A quel point le programme nucléaire iranien est-il affaibli ?

Je ne crois pas que le programme nucléaire iranien soit significativement endommagé. Israël a été incapable de détruire les installations profondément enfouies dont dispose l’Iran à Natanz ou à Ispahan. L’usine d’enrichissement de Fordo n’a pas été touchée. Israël a détruit des bâtiments en surface, a perturbé le courant à Natanz et a tué des scientifiques. Mais il y a encore des centaines de kilogrammes d’uranium enrichi et des milliers de centrifugeuses, qui sont sans doute entreposées en toute sécurité sous terre. A moins qu’Israël ne tue tous les scientifiques et ne détruise ces centrifugeuses et le stock d’uranium, on pourra dire que le programme nucléaire iranien a été retardé, mais n’a pas été éliminé.

Israël affirme que cette guerre était préventive parce que la menace nucléaire était imminente après que l’Iran a enrichi plus de 400 kg d’uranium, assez pour fabriquer dix bombes. De combien de temps disposait l’Iran pour se doter d’une bombe ?

L’Iran avait, comme le disait le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, un an ou quelques mois pour se doter de la bombe. C’est une préoccupation. Mais on ne peut pas dire que c’était imminent. Cela fait quinze ans que l’Iran est à quelques mois de la bombe nucléaire.

Alors pourquoi ces frappes maintenant ?

Ce qu’Israël a réellement ciblé, c’était le leadership militaire du pays et sa capacité à riposter avec des missiles. Pour Israël, le sujet n’est pas tant les armes nucléaires, que le régime. C’est une « opération de décapitation » [comme l’a revendiqué l’ambassadeur d’Israël en France sur RTL le 13 juin]. Les frappes sur les sites nucléaires sont comme une feuille de vigne déposée sur les véritables motivations d’Israël : faire tomber le régime. Cela transparaît dans le nom de cette opération « Rising Lion » , c’est une référence à une révolution en Iran. Le lion était présent sur le drapeau de l’Iran avant la révolution islamique.

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