La rue de l’Epeule, qui s’étire sur un peu plus de 700 mètres près du centre de Roubaix (Nord), a des allures de « petite Algérie ». Ici se mêlent un morceau d’Oran, de Constantine ou de Béjaïa, les briques rouges en plus. Des cafés kabyles où l’on parle berbère voisinent avec des gargotes où l’on plaisante en darija – l’arabe dialectal –, avec des commerces exposant des produits made in Algeria, comme les caloriques kalb el louz (gâteau de semoule aux amandes) et karantika (plat à base de farine de pois chiches) ou des pots d’El Mordjene Cebon, la fameuse pâte à tartiner, reine des réseaux sociaux.

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Derrière ces façades, ce quartier – façonné par une immigration maghrébine depuis plus d’un siècle, venue travailler, entre autres, dans les usines textiles – subit sans bruit les tensions diplomatiques actuelles entre la France et l’Algérie. Propos d’Emmanuel Macron sur « l’Algérie » qui se « déshonore » en refusant de libérer l’écrivain binational Boualem Sansal, litiges autour du Sahara occidental, Paris qui déplore les « postures d’hostilité » de son voisin méditerranéen… Les accrocs se sont multipliés ces dernières semaines.

Les Algériens de la rue de l’Epeule vivent ces querelles dans leur chair. Un peu, beaucoup, intensément. Ces différends alimentent une crainte, celle d’endosser une mauvaise réputation à perpétuité. Il suffit de s’asseoir à une terrasse ou de prendre part à une partie de rami entre chibanis – « cheveux blancs », en arabe, surnom des anciens travailleurs à la retraite – tirés à quatre épingles pour comprendre que la brouille « fait mal au cœur », comme le résume Meziane, 78 ans, assis près du comptoir d’un bar.

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