Le gouvernement persiste et signe. L’association de lutte contre la corruption Anticor, créée en 2002 et engagée à ce jour dans 148 procédures judiciaires, dont les affaires Alexis Kohler – le secrétaire général de l’Elysée a été mis en examen en 2022 pour des décisions qu’il avait prises concernant l’armateur italo-suisse MSC, avec lequel il avait des liens familiaux –, de la tour Triangle, à Paris – où Elisabeth Borne est mise en cause en tant qu’ancienne directrice générale de l’urbanisme à la Mairie de Paris –, ou encore les contrats russes d’Alexandre Benalla, ne retrouvera pas à court terme son agrément. Vendredi 26 juillet, au lendemain de la date butoir légale, nulle mention dans le Journal officiel de cette attribution.

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Cette absence constitue un refus implicite de l’exécutif. Il s’agit du deuxième depuis la perte de l’agrément, en 2023. Ce précieux sésame permettait à l’association de se constituer partie civile dans les affaires de probité, ce qui contraint le parquet à transmettre à un juge d’instruction ses plaintes après un classement sans suite et lui donne accès au dossier judiciaire.

Cette situation « [montre] que le mécanisme de l’agrément [peut] devenir un bouchon dans les mains du gouvernement, à rebours de l’intention du législateur, regrette le président d’Anticor, Paul Cassia. Les silences successifs et persistants [de l’exécutif] (…) évoquent à cet égard un véritable détournement de pouvoir. Il est nécessaire de repenser [ce mécanisme] en le confiant à une autorité indépendante de l’exécutif ».

« Une stratégie d’inertie »

« Le gouvernement cherche manifestement à enterrer la demande d’agrément par une stratégie d’inertie, abonde Me Vincent Brengarth, avocat d’Anticor. C’est tout à fait significatif de la place secondaire occupée par la lutte contre la corruption, mais nous ne nous laisserons pas endormir. »

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Le cabinet du premier ministre, Gabriel Attal, n’a pas répondu à nos sollicitations. Le ministre démissionnaire de la justice, Eric Dupond-Moretti, initialement chargé d’étudier la demande, s’était déporté de ce dossier au profit de Matignon, à la suite du dépôt par Anticor d’une plainte le visant en 2020. Il a depuis été relaxé par la Cour de justice de la République, qui a cependant estimé en novembre 2023 qu’il était « en situation objective de conflits d’intérêts ».

Anticor prévoit de poursuivre la bataille judiciaire. Un recours devant le tribunal administratif doit être introduit vendredi 26 juillet au matin contre ce deuxième refus d’agrément. L’association conteste également le premier refus implicite devant le tribunal administratif, ainsi que la perte initiale de son agrément devant le Conseil d’Etat.

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