
« J’ai la sensation que les objets ont une vie en dehors de nous, que certains espaces ont leur existence propre, leur intimité », confie Tatiana Trouvé. Cette « Vie étrange des choses », pour reprendre le titre de son exposition à Venise, est la matière première de l’insaisissable plasticienne franco-italienne. Chacune de ses expositions, du Mamco de Genève (Suisse) au Centre Pompidou, à Paris, en explore les mystères, avec une poésie constamment réinventée. Jusqu’à la fin de l’année, le Palazzo Grassi abrite ainsi ces vies invisibles, au fil d’installations qui sont autant de microvilles invisibles, inspirées du romancier Italo Calvino (1923-1985) qu’elle aime tant. Conçu sur mesure pour le palais vénitien, le parcours est truffé d’énigmes, de traces (moments vécus ou lectures), de passages inaccessibles aussi.
« Comment on habite, comment on arpente le monde », telle est l’une des questions qui traverse son œuvre. Nourrie de philosophie écologique, elle se construit à partir d’incessants allers-retours entre son univers « imaginaire, intime », et le monde extérieur, qui vient sans cesse l’innerver, la bousculer, du désastre écologique aux émeutes qui ont suivi la mort du jeune Nahel, à Nanterre (Hauts-de-Seine), en juin 2023. « Tout le travail de Tatiana est traversé par les urgences du temps présent, et elle donne nombre de signes sur notre responsabilité par rapport à l’époque, mais sans aucun didactisme », rappelle Caroline Bourgeois, cocommissaire de l’exposition avec James Lingwood.
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