Droits de douane américains : des conséquences différentes d’un pays européen à l’autre
En valeur, c’est de loin l’Allemagne qui, au sein de l’Union européenne (UE), exporte le plus de marchandises vers les Etats-Unis, pour un montant de 161,2 milliards de dollars (138,3 milliards d’euros) en 2024, suivie par l’Irlande et l’Italie, respectivement 72 et 64 milliards de dollars, selon des données Eurostat.
La France est moins exposée, mais les champions de l’agroalimentaire et du luxe seront particulièrement touchés.
Selon Eurostat, 20 % des biens exportés depuis l’UE le sont à destination des Etats-Unis.
L’UE dans son ensemble a dégagé un excédent commercial vis-à-vis des Etats-Unis de 235,6 milliards de dollars (201,5 milliards d’euros), selon le Bureau d’enquêtes et d’analyses (BEA), qui dépend du département américain du commerce et qui a publié ses statistiques pour 2024 début février. Seule la Chine affiche un montant supérieur.
- L’Irlande, le laboratoire européen
L’Irlande enregistre l’excédent commercial le plus important des membres de l’UE avec 86,7 milliards de dollars (74,39 milliards d’euros) en valeur. C’est aux Etats-Unis que l’Irlande exporte plus du quart de ses produits.
Cela s’explique notamment par l’implantation en Irlande de grands groupes américains, notamment pharmaceutiques, comme Pfizer, Eli Lilly ou Johnson & Johnson qui se sont installés dans ce pays d’Europe pour y bénéficier d’un impôt à 15 % sur les grandes sociétés, contre 21 % aux Etats-Unis. Ces sociétés peuvent ainsi héberger leurs brevets en Irlande et vendre sur le marché américain, où les prix des médicaments sont traditionnellement plus élevés que dans le reste du monde. Donald Trump a précisé dimanche que le secteur pharmaceutique ne bénéficierait pas d’un traitement particulier.
L’Irlande accueille par ailleurs sur son sol la plupart des sièges européens des géants américains de la tech, comme Apple, Google ou Meta, également séduits par la fiscalité irlandaise attractive.
- L’Allemagne, le champion industriel
Première économie de l’UE, l’Allemagne a dégagé en 2024 un excédent commercial record avec les Etats-Unis atteignant 84,8 milliards de dollars.
Les Etats-Unis absorbent à eux seuls 10,5 % des exportations allemandes, selon l’office de statistiques allemand Destatis. Les Américains se montrent friands des marques automobiles venues d’Allemagne, mais aussi de machines-outils et de produits pharmaceutiques « Made in Germany ».
La banque centrale allemande a averti en début d’année que l’imposition de droits de douane américains sur les produits allemands pourrait réduire de 1 % le produit intérieur brut du pays.
- L’Italie et la France, en deuxième rideau
L’Italie et la France, avec respectivement 44 milliards de dollars et 16,4 milliards de dollars d’excédent selon les Américains (mais pour la France un déficit de quelques milliards, selon les statistiques des douanes), seraient vraisemblablement moins touchées. Toutefois, l’impact varie d’un secteur d’activité à l’autre au sein de chacune de ces deux économies.
L’agroalimentaire et les produits viticoles en particulier seraient affectés dans les deux pays. Les Américains ont l’habitude de consommer des produits « Made in France » et « Made in Italy » mais pourraient en raffoler nettement moins si les prix grimpent pour tenir compte des droits de douane. Le secteur français du luxe (parfums, maroquinerie, etc.) est également très exposé.
Pour le numéro un mondial du luxe LVMH, un droit de douane de 15 % « serait un bon résultat », avait fait savoir le groupe jeudi en publiant ses résultats semestriels, marqués par une chute du bénéfice net et des ventes. Il pense pouvoir compenser en augmentant ses prix et en optimisant sa production, notamment aux Etats-Unis.
- Autriche et Suède, en excédent également
L’Autriche et la Suède sont aussi en excédent avec les Etats-Unis, respectivement de 13,1 milliards et 9,8 milliards de dollars.