Qui remettrait aujourd’hui en cause l’existence des familles recomposées en raison du brouillage des relations qu’elles suscitent ? Certes, chaque enfant concerné dispose de parents et de beaux-parents, et se perd parfois dans le nombre de ses grands-parents. Faudrait-il pour autant, simplement parce que l’organisation des fêtes de famille est d’une complexité inouïe, en revenir au modèle unique et bien ordonné de la famille nucléaire ? Dans le même ordre d’idées, qui, dans sa vie professionnelle, n’a pas subi les difficultés d’une organisation qui voit chacun participer à de multiples projets, sans toujours comprendre la cohérence qui les régit ? Devrait-on pour autant revenir à la simplicité de l’organigramme en râteau ?

C’est pourtant ce que suggère le nouveau premier ministre à propos de l’action publique locale en annonçant un « grand acte de décentralisation », fondé sur la clarification des compétences entre collectivités locales et la fin des financements croisés entre elles. Il vient ainsi confirmer le diagnostic du président de la République qui affirmait, lors du Congrès des maires, en novembre 2023, que cette complexité inhérente à l’organisation des sociétés contemporaines revenait à fonctionner « cul par-dessus tête » et exigerait donc une remise en ordre vers un jardin à la française.

Cette intention de réformer à rebours des évolutions de la société n’a qu’une justification : donner aux contribuables un gage simple et lisible de réduction de la dépense publique. Mais à quel prix ? D’abord celui d’une illusion. Dès le premier acte de la décentralisation, en 1982, avec les lois Defferre, cette politique a mis en avant le principe de « taylorisme territorial » : à chaque échelon, l’attribution d’un bloc de compétences spécialisées. En vain, car la réalité contraint chaque institution territoriale à faire un peu de tout. L’explication ne tient pas seulement aux rivalités de pouvoir. Ce ne sont pas tant les financements qui sont croisés que les enjeux à traiter.

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