Alors même qu’un Français sur cinq souffre d’un trouble psychique, la psychiatrie demeure le parent pauvre de la médecine française. Pénurie de médecins, désaffection croissante des jeunes internes pour cette spécialité, fermeture massive de lits… Face à ce désengagement chronique, les patients et leurs familles sont laissés dans un désarroi croissant.

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A cette crise structurelle s’ajoute une crise aiguë d’approvisionnement en médicaments psychotropes essentiels. Depuis plusieurs mois, la quétiapine, utilisée dans la schizophrénie et les troubles bipolaires, connaît une rupture d’approvisionnement totale. Aujourd’hui, la liste des médicaments en situation de pénurie plus ou moins critique s’allonge : sertraline et venlafaxine, antidépresseurs de référence ; lithium, indispensable aux patients bipolaires, avec date de remise à disposition « indéterminée » ; et même l’olanzapine à libération prolongée, réservé aux formes les plus difficiles à stabiliser, indisponible à cause d’une défaillance de fabrication des aiguilles d’injection​.

Chaque rupture de traitement est susceptible de provoquer des décompensations aiguës, des souffrances psychiques insupportables, et surcharge davantage des services psychiatriques déjà saturés. On estime qu’environ 20 % des patients bipolaires non traités décèdent par suicide​.

Paradoxe de la régulation des prix

Les causes de ces pénuries de médicaments sont multiples : fragilité des chaînes d’approvisionnement, dépendance à des sites industriels étrangers uniques, stratégies commerciales des laboratoires pharmaceutiques privilégiant des marchés plus rentables, régulation des prix en France jugée insuffisamment attractive par les fabricants.

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Les industriels soulignent les prix trop bas des médicaments « essentiels » en France et n’hésitent pas à orienter leurs ventes vers des marchés plus rémunérateurs​. Parfois, ils abandonnent purement et simplement la production de molécules anciennes, pourtant efficaces, pour se concentrer sur des médicaments plus récents, vendus bien plus cher.

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