Une guerre chasse l’autre. Il se peut fort qu’à la date anniversaire du 7 octobre 2023, qui est à la fois le jour du plus grand massacre de civils israéliens par les miliciens du Hamas et celui du début de la destruction de la bande de Gaza par l’armée de l’Etat hébreu, les regards soient tournés vers la « ligne bleue », la ligne de retrait qui sépare Israël du Liban faute d’une véritable frontière agréée par les deux pays. Une telle diversion, évidemment dramatique, permettrait aux perdants de la guerre de Gaza de faire l’économie d’une douloureuse introspection.

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés L’offensive d’Israël contre le Hezbollah plonge le Liban dans la guerre

Il n’est pas question ici des victimes directes de cette guerre dont on ne voit pas la fin : les dizaines de milliers de morts civils palestiniens, presque une centaine de milliers de blessés, une succession de champs de ruines où rien n’a été épargné. La guerre a plongé près de 100 % de la population dans la pauvreté et une dramatique insécurité alimentaire, selon le dernier rapport de la Banque mondiale publié ce mois-ci. Réalisé en dépit de la chape de plomb maintenue par Israël sur Gaza, ce rapport note également l’effondrement du système scolaire, du fait de destructions massives d’écoles (estimés à 95 % du total) et de centaines de morts parmi le personnel enseignant, un désastre répliqué à l’identique dans le secteur de la santé.

Humiliation sur humiliation

Plus de 2 millions de personnes sont concernées, et pour longtemps. La riposte israélienne a décimé la milice du Hamas, détruit une bonne partie de son armement et de ses infrastructures à un prix exorbitant. Mais l’armée israélienne avait pour mission principale un objectif inatteignable, l’éradication totale du mouvement islamiste, et une seconde devenue progressivement secondaire aux yeux de la coalition au pouvoir, la libération des Israéliens pris en otage le 7 octobre. Près d’un an après son début, la guerre se transforme progressivement en réoccupation durable de l’étroit territoire.

Cette réoccupation est adossée pour l’heure à deux corridors militaires, l’un au sud de la ville de Gaza, l’autre à la frontière avec l’Egypte. Elle est complétée par la création de facto d’une zone tampon sur le pourtour de la bande de terre qui réduit encore sa surface utile. L’armée israélienne entend ainsi garder une capacité d’action au sol, et en profondeur. Autant dire que la reconstruction de Gaza, lorsqu’il en sera question, relèvera d’une autre forme d’enfer, pour des résultats dont la pérennité ne pourra jamais être garantie. Le Programme des Nations unies pour l’environnement a estimé en juin à 39 millions de tonnes les gravats générés par les bombardements massifs israéliens. L’ONU estime qu’il faudra plus d’une décennie pour les traiter.

Il vous reste 54% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Share.
Exit mobile version