LA LISTE DE LA MATINALE
Les sorties de la semaine plongent au cœur de conflits et contentieux et s’emploient à trouver le chemin des réparations. Sur le plan de l’histoire coloniale avec Dahomey, de Mati Diop, documentaire mutant qui accompagne la restitution d’œuvres d’art au Bénin. Devant le prétoire avec l’affaire criminelle du Fil, le dernier long-métrage investigateur de Daniel Auteuil. Et, enfin, la séculaire querelle entre humains et animaux dans Le Léopard des neiges, de Pema Tseden, qui s’aventure sur les hauts plateaux du Tibet.
À ne pas manquer
« Dahomey » : les statues meurent aussi
De 1892 à 1894, le commandant en chef Alfred Amédée Dodds (1842-1922) mène la seconde expédition du Dahomey, au terme de laquelle ce puissant royaume, dirigé par le roi Béhanzin, tombe aux mains de la France. Au passage, Dodds rafle vingt-six objets royaux, expédiés au Musée d’ethnographie du Trocadéro, puis réinstallés en 2000 au Musée du quai Branly, à Paris. Le 10 novembre 2021, la France restitue solennellement ces trésors à la République du Bénin, ex-Dahomey, où ils sont temporairement exposés au palais présidentiel de Cotonou.
De ce moment, la cinéaste Mati Diop a souhaité conserver la trace. La jeune Franco-Sénégalaise, fille du musicien Wasis Diop, nièce du cinéaste Djibril Diop Mambéty (1945-1998), signe aujourd’hui avec Dahomey son film à tous égards le plus étrange. Court, intense, senti, impur. Inqualifiable aussi : documentaire sans pédagogie, essai sans signature, reconstitution sans fiction. L’attention du spectateur est requise par une histoire particulière : celle de la statue numéro 26, une sculpture du roi Ghézo (1818-1858). C’est à travers lui que la restitution trouve à se raconter, par l’invention d’une voix off « subjective » comme venue du fond des âges. J. Ma.
Documentaire français de Mati Diop (1 h 08).
À voir
« Le Fil » : désigné coupable
A 74 ans, Daniel Auteuil n’a pas rangé au placard son costume d’acteur. Plus rare ou moins sollicité depuis quelques années, l’acteur, partant du principe qu’on n’est jamais si bien servi que par soi-même, est passé derrière la caméra dès les années 2010. Le Fil, son cinquième long-métrage comme réalisateur, est largement le plus convaincant d’entre tous. Une histoire criminelle glauque et tendue – inspirée d’un fait divers –, une mise en scène sobre et efficace, des acteurs convaincants, un twist d’enfer emportent ici le morceau.
Il y interprète Me Jean Monier, un avocat retiré des dossiers criminels depuis qu’un meurtrier récidiviste doit à son talent de l’avoir innocenté. Il arrive qu’un soir, son ex-femme (Sidse Babett Knudsen) rechigne à se déplacer pour une garde à vue. Toujours galant homme, Monier part dans la nuit rejoindre le commissariat. C’est là qu’il fait la connaissance de Nicolas Milik (Grégory Gadebois), bon bougre que les circonstances désignent comme l’assassin de son épouse, retrouvée la gorge tranchée. Construit sur un long retour en arrière, le récit se termine au prétoire où se décidera simultanément le sort du prévenu et celui du film. J. Ma.
Il vous reste 77.18% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.