William Dab : « Cinq ans après, la France est dans un oubli qui confine au déni »
Cinq ans après le début de la pandémie, la France n’a pas su tirer les leçons de la crise due au Covid-19, estime William Dab, épidémiologiste, dans une tribune au Monde. Entre 2005 et 2011, à la suite des alertes du SRAS et de la grippe H1N1, l’Etat avait construit un dispositif contre les pandémies qui n’a pas servi, ce qui a été reproché à Roselyne Bachelot, alors ministre de la santé. Le dispositif a donc été déconstruit ; comme si le risque avait disparu, comme s’il fallait arrêter de s’assurer contre l’incendie, puisqu’il n’y en avait pas eu au cours des dernières années.
Pour « éviter la panique » en situation d’incertitude, une erreur fréquente consiste à vouloir rassurer. On nous a ainsi dit que la probabilité que le virus chinois arrive en France était très faible, et que le port du masque était non seulement inutile, mais dangereux. Ces erreurs initiales ont détruit la confiance : quand la situation s’aggrave, elle débouche sur une crise, parce que les citoyens ont le sentiment qu’on les trompe.
Se mélangent, dans cette défaite, des facteurs conjoncturels, mais aussi des facteurs structurels liés à la place de la santé publique dans l’appareil d’Etat ainsi qu’au manque d’anticipation et de vision. Malgré les avis du conseil scientifique, qui ne s’est jamais trompé, le gouvernement a été incapable de proposer une stratégie de gestion argumentée.
William Dab, épidémiologiste : « Cinq ans après la pandémie de Covid-19, la France est dans un oubli qui confine au déni »
Par William Dab
Le 17 mars 2020, la France se confinait et nos libertés fondamentales étaient suspendues. L’instruction de la Cour de justice de la République visant trois anciens ministres (Agnès Buzyn, Edouard Philippe et Olivier Véran) ne donnera finalement pas lieu à un procès. D’une certaine façon, il s’agit d’une opportunité, car si les magistrats instructeurs avaient rassemblé les preuves que les ministres avaient enfreint la loi, l’explication du fiasco dénoncé par les plaignants serait simple : des fautes individuelles en auraient été la cause. Maintenant que le dossier est clos, il faut chercher les causes systémiques et organisationnelles ailleurs : elles renvoient à la faiblesse structurelle de la santé publique dans notre pays.