La pédagogie n’ayant pas fonctionné, François Bayrou a décidé de jouer son va-tout pour persuader les Français de la nécessité de reprendre le contrôle des finances publiques du pays. Le premier ministre a annoncé, lundi 25 août, qu’il sollicitera un vote de confiance le 8 septembre devant l’Assemblée nationale. Il s’agit d’engager la responsabilité du gouvernement à l’issue d’une déclaration de politique générale, afin d’obtenir une majorité sur le diagnostic de la situation de surendettement et l’impératif d’y remédier urgemment « en dépensant moins et en produisant plus ». A défaut de cette clarification cruciale, François Bayrou estime qu’il est impossible de mener à bien son action et il en tirera les conséquences en quittant le pouvoir.

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Face à un débat qui, selon ses propres mots, « a sombré dans la confusion » en étant « dévoyé » par les oppositions, accusées de rester dans le déni sans prendre en compte la dimension de l’enjeu de la situation, le chef du gouvernement tente de reprendre la main en plaçant chacun face à ses responsabilités. Il part du principe que, s’il n’existe pas un consensus minimal pour s’entendre sur la gravité de la situation et l’exigence de s’y attaquer sans délai, la France ne pourra pas sortir de son impasse financière.

Le premier ministre, François Bayrou, lors d’une conférence de presse, à Paris, le 25 août 2025.

L’annonce, le 15 juillet, d’un effort de près de 44 milliards d’euros sur le budget 2026 pour réduire le déficit a cependant déjà suscité un vaste mouvement de rejet. Ce « moment de vérité », qui avait vocation à prendre à témoin l’opinion pour créer un électrochoc, a eu l’effet exactement inverse. Des mesures particulièrement impopulaires comme la suppression de deux jours fériés et la non-revalorisation des retraites, des minima sociaux, des taux d’imposition ont braqué le pays. Faute de convaincre que les efforts seraient équitablement partagés, le premier ministre s’est retrouvé face à une addition de ressentiments. A la menace de La France insoumise (LFI) de déposer une motion de censure dès la rentrée parlementaire du 23 septembre s’est ajoutée celle du Rassemblement national (RN), et surtout l’émergence d’un mouvement nébuleux promettant de bloquer le pays le 10 septembre, sous l’œil bienveillant de toute une partie de la gauche.

Moment critique

Au plus bas dans les sondages, François Bayrou voyait ses marges de manœuvre se réduire. Soit il laissait se dérouler un débat budgétaire très mal parti, avec une forte probabilité de censure, soit il tentait le tout pour le tout en déconnectant la nécessité d’un plan d’économies de ses modalités, dans l’espoir de clarifier la situation.

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Ce coup de poker, qui lui permet de rester fidèle au discours de sérieux budgétaire qu’il a toujours porté, s’apparente, de fait, à celui qu’a tenté Emmanuel Macron avec la dissolution de l’Assemblée nationale, il y a un peu plus d’un an. Tout aussi risqué, il apparaît d’emblée tout aussi mal engagé. Le RN, LFI, le Parti socialiste et le Parti communiste ont d’ores et déjà annoncé qu’ils ne voteront pas la confiance au gouvernement. Le premier ministre veut encore croire qu’« il y a des moments où une prise de risque réfléchie permet d’échapper au plus grave ». Celui-ci semble pourtant se profiler. Si le gouvernement tombe à ce moment critique, deux jours avant une agitation sociale rappelant le mouvement des « gilets jaunes », sans une esquisse de budget crédible à l’horizon, sous la pression accrue des marchés financiers, François Bayrou aura joué les cassandres en pure perte. Le départ du messager n’aura fait que compliquer ce qu’il cherchait à résoudre, l’équation financière de la France.

Le Monde

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