Friedrich Merz, le prochain chancelier allemand, l’a dit sans ambages au soir même de sa victoire électorale, dimanche 23 février : sa « priorité absolue » sera de renforcer l’Europe le plus rapidement possible en vue de construire « une véritable indépendance vis-à-vis des Etats-Unis ».

Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Friedrich Merz, le probable futur chancelier allemand, annonce un « quoi qu’il en coûte » sur la défense

C’est une révolution copernicienne parce que les Allemands, comme beaucoup d’autres Européens, avaient, jusqu’ici, conçu leur sécurité dans le cadre de l’Alliance atlantique (OTAN), largement sous tutelle américaine. M. Merz a d’ailleurs ajouté qu’il n’avait jamais pensé être amené à s’exprimer comme il l’a fait. L’attitude ouvertement hostile de l’administration Trump a brutalement accéléré les discussions sur l’autonomie stratégique prônée depuis 2017 par Emmanuel Macron.

Quatre questions se posent : celle de l’ampleur et du rythme de l’effort de défense ; celle de son efficacité ; celle des pays qui y participeront ; et enfin celle de son financement.

Fin des fragmentations

Depuis dix ans, les dépenses de défense des membres européens de l’OTAN, qui avaient continûment baissé depuis la fin de la guerre froide, sont remontées pour atteindre 2 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024. C’est encore trop peu au vu de l’ampleur de la menace russe, et surtout du risque de retrait des Etats-Unis.

Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, ont récemment parlé de 3 % à 3,5 % du PIB. L’effort à fournir est donc de 200 milliards à 300 milliards d’euros par an. C’est à cet ordre de grandeur (250 milliards d’euros) qu’aboutit aussi le cercle de réflexion Bruegel dans une récente évaluation des besoins à court terme.

Lire aussi | Devant la Communauté politique européenne, Emmanuel Macron réaffirme son souhait d’une autonomie stratégique renforcée du continent

Pour être efficace, cependant, cette dépense devra mettre fin à la fragmentation de l’industrie européenne de défense, qui lui interdit de tirer parti des effets d’échelle et se traduit par des surcoûts massifs. Les estimations, qui varient selon les sources, dépassent 50 % selon certains experts (le rapport d’Enrico Letta, présenté en avril 2024, cite le chiffre de 100 milliards d’euros par an). Accroître le montant des investissements dans la défense sans traiter ce problème ne ferait qu’augmenter ces surcoûts. Il faut donc mettre en place une politique industrielle pour la défense en même temps. Quelles que soient ses modalités, celle-ci impliquera une consolidation à l’échelle européenne, qui permette aux producteurs restants de bénéficier à plein des rendements d’échelle.

Il vous reste 60.45% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

Share.
Exit mobile version