Daniel Chapellier, ex-directeur de Saint-Jean-de-Passy à Paris, a été reconnu coupable d’agression sexuelle sur un élève de 14 ans dans cet établissement privé, et condamné à cinq ans de prison avec sursis, vendredi 6 juin dans la soirée par le tribunal de Nanterre.

Au cœur des débats, un quasi huis clos dans le bureau du directeur de cet établissement réputé de Paris.

« Le tribunal a considéré que la version de [la victime] était plus vraisemblable que la vôtre », a détaillé la présidente, Céline Ballerini, qui évoque des « faits particulièrement graves ». « On n’est pas sur une agression sexuelle simple, parce que vous êtes précisément un directeur d’établissement, et que (…) à partir du moment où vous êtes un éducateur vous devez être exemplaire », a encore poursuivi le tribunal.

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Cette condamnation et cette peine, dont son avocat, Me Yassine Yakouti, a annoncé immédiatement interjeter appel, vont au-delà des trois ans d’emprisonnement avec sursis requis par la procureure.

Les parents de l’adolescent, qui avait 14 ans au moment des faits, l’association de l’établissement privé parisien et l’association Innocence en danger ont été reçues en tant que parties civiles.

L’ex-directeur a également été condamné à une peine d’inéligibilité de cinq ans, une interdiction d’exercer une activité en lien avec les mineurs assortie de l’exécution provisoire et inscrit au fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais).

La deuxième journée d’audience se tenait vendredi devant le tribunal judiciaire de Nanterre, après une première journée le 21 mai et une mise en continuation, douze témoins cités par la défense de l’ex-directeur devant encore être entendus.

Sidération

Ce sont ces témoins qui ont défilé à la barre vendredi, affirmant leur sidération face aux faits dénoncés, disant n’avoir jamais été témoins ni n’avoir entendu parler de propos ambigus du prévenu.

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Un seul témoin, une assistante de direction, a témoigné avoir vu l’adolescent, convoqué pour des problèmes scolaires, dans le bureau du directeur ce jour de février 2021, mais sans avoir rien constaté d’autre.

L’adolescent accuse le responsable de l’avoir agressé sexuellement, alors que ce dernier assure que c’est l’élève qui s’est exhibé devant lui.

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Plusieurs autres témoins, tous cités à comparaître par la défense – père ou mère d’élève, encadrant, non présents lors des faits – ont en revanche jugé plausible que l’adolescent ait menti.

D’autres encore, dont le fils du prévenu, sont venus réaffirmer à la barre leur confiance dans les qualités d’« éducateur » de M. Chapellier, réputé sévère voire autoritaire selon plusieurs témoignages.

Daniel Chapellier, 75 ans, a fait carrière dans des établissements privés sous contrat et a notamment dirigé le collège Stanislas, établissement accusé de dérives homophobes et sexistes ayant fait l’objet d’une enquête administrative en 2023.

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Ce dossier prend une coloration symbolique alors que les révélations de violences sexuelles et physiques dans l’enseignement catholique se succèdent, déclenchées par l’affaire de Bétharram.

Des questions sur la sexualité

Vendredi en début de soirée, M. Chapellier a une dernière fois réaffirmé « son innocence absolue » à la barre avant que le tribunal ne parte délibérer.

« Je n’ai pas d’éléments, pas de dénonciations, j’ai un gamin de 14 ans qui raconte une scène à sa maman et ça suffit à déclencher une garde à vue de Daniel Chapellier », a tonné peu avant Yassine Yakouti, l’un de ses avocats.

« Contrairement à ce qu’on va vous dire, ce n’est pas un dossier 50/50, [qui oppose] la vraisemblance d’un discours contre la vraisemblance d’un autre discours, [le plaignant] raconte dans le détail », a de son côté plaidé Me Clotide Lepetit.

Elle a souligné que, comme le plaignant, des anciens élèves d’établissements où a travaillé M. Chapellier ont également déclaré aux enquêteurs qu’il leur posait des questions liées à la sexualité lors d’entretiens dans le cadre scolaire.

Durant l’enquête, des recherches sur des sites pornographiques de termes comme « teen boys » (« adolescents ») ont été retrouvées sur le matériel informatique de M. Chapellier, qui assure qu’il cherchait simplement à comprendre ce que ses élèves regardaient.

Le Monde avec AFP

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